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Intervention de Marc Fesneau

Réunion du mercredi 29 mai 2024 à 22h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Marc Fesneau, ministre :

Le système assurantiel participe à la résilience du système agricole, qui est en outre assurée par les pratiques, l'accès à l'eau et les systèmes de protection des cultures, comme la protection contre la grêle ou les techniques de taille des vignes. Il ne pourra pas prendre en charge tous les aléas climatiques qui sont devant nous.

Les aléas ne sont pas très prévisibles. Nous avons connu en 2022 de gros aléas liés à la sécheresse mais peu en 2023, hormis la sécheresse sur la bordure méditerranéenne. En 2024, j'ai le sentiment que c'est l'aléa des inondations auquel nous devrons faire face. En raison du dérèglement climatique, ces événements sont chaque année plus fréquents et plus puissants et provoquent des dégâts chaque fois plus importants. Nous avons construit ce système assurantiel pour y faire face, mais il doit trouver son équilibre économique.

Le taux de diffusion a été supérieur à celui que nous avions prévu dans le plan triennal – alors que certains pensaient que nous n'y arriverions pas et que la moitié du budget serait bien suffisante. Les surfaces couvertes par un contrat d'assurance sont ainsi passées de 4,8 millions d'hectares en 2022 à 6,5 millions en 2023, soit une augmentation de 33 %. On est passé de 0,5 % à 9 % pour les prairies et de 1,4 % à 10 % pour l'arboriculture et aussi de 32 % à 37 % pour la viticulture et de 31 % à 35 % pour la grande culture, qui n'étaient pas des cibles privilégiées puisque le taux de diffusion y était déjà important.

Nous ne pouvons pas nous reposer sur nos lauriers et nous devons continuer à convaincre et à mobiliser. Le premier axe de travail est le système satellitaire. Il fait l'objet d'une certaine défiance, mais disons-le : sans système satellitaire, il ne peut y avoir de système assurantiel – il n'est pas possible d'aller dans chaque exploitation pour vérifier chaque prairie. Les satellites permettent tout de même de mesurer l'écart à la pousse, même s'il y a débat. Pour crédibiliser les choses, nous allons déployer en 2024 un réseau de 150 fermes de référence qui permettront de confronter la perception sur le terrain avec les informations fournies par les satellites. Nous travaillons avec les assureurs pour que leurs indices individuels soient mesurés plusieurs fois dans l'année afin d'éviter les distorsions.

Le deuxième sujet est la procédure de versement simplifié de l'ISN : l'agriculteur qui aura désigné son interlocuteur agréé pourra la recevoir automatiquement, sans démarche supplémentaire. La procédure de recours fait encore l'objet de désaccords. J'ai donc lancé une mission « flash » du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux. Les coûts de gestion sont à prendre en compte et, même s'il faut des voies de recours, il faut prendre garder à ne pas fragiliser le système.

La question de la moyenne olympique se pose, car si l'indemnité est calculée sur la base des récoltes des cinq dernières années, un agriculteur ayant subi quatre années de gel, de grêle et de sécheresse ne recevra pas grand-chose. Les aides sont classées par l'Organisation mondiale du commerce dans un système de boîtes de couleurs – rouge, orange, bleue et verte – et l'Union européenne en fait une application stricte. Plutôt que d'essayer d'obtenir une modification de ce système – nous aurions sans doute plus à y perdre qu'à y gagner – notre stratégie est de demander à la Commission de modifier la réglementation PAC et l'encadrement des aides d'État afin de permettre aux États membres de mobiliser davantage la boîte orange, ce qui permettrait d'allonger par exemple la période de référence à huit ans. Nous y travaillons et j'en ai encore parlé à la Commission européenne lundi dernier, à l'occasion d'un conseil des ministres. Je pense que nous pourrons avancer avec certains de mes collègues, la Commission m'ayant paru ouverte.

À la fin de 2022, des accords significatifs ont été trouvés avec les assureurs, l'État et les autres acteurs afin de prendre en charge les non-assurés. J'ai déjà pris certaines décisions afin d'éviter toute pression. Nous prendrons le temps qu'il faudra. Pour l'année 2024, les assureurs accompagneront la réforme et poursuivront sa mise en place en gérant l'ISN pour les cultures non assurées de leurs clients assurés. Pour l'ensemble des prairies, qu'elles soient assurées ou pas, l'État prendra en charge uniquement l'assurance des exploitants intégralement non assurés. À l'avenir, en fonction des frais de gestion qui seront proposés par les assureurs pour la gestion des autres agriculteurs non assurés, nous examinerons l'opportunité de confier la gestion de tous les non assurés au réseau d'interlocuteurs agréés.

Vous pouvez compter sur moi pour faire preuve d'une transparence totale sur le coût des primes, une fois tous les éléments chiffrés en notre possession. L'objectif de la réforme est de retrouver un équilibre économique, pas de subventionner un ratio de 50 % entre le sinistre et la prime ni de donner aux assureurs des opportunités de surprofit. Nous allons être très vigilants.

Le système assurantiel est une pierre supplémentaire à l'édifice de la résilience agricole que nous essayons de construire. Il va avec l'adaptation des filières, les efforts d'accès et d'économie d'eau ou l'adoption de systèmes de protection. Nous avons ouvert des guichets, notamment dans le cadre du plan de souveraineté pour la filière des fruits et légumes, pour doter les agriculteurs de moyens leur permettant de s'équiper en matériel de protection, ce qui participe d'un système assurantiel préventif. J'ai d'ailleurs demandé aux assureurs de différencier leurs tarifs entre ceux demandés aux agriculteurs qui ont investi dans des systèmes de protection, qui coûtent cher, et aux autres, afin qu'il y ait une prime à l'investissement dans ces systèmes.

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