Chacun peut avoir une opinion sur l'opportunité d'une dette détenue par ses résidents nationaux : c'est un choix politique. La souveraineté peut avoir un coût, mais les exemples du Japon et de la Suisse montrent qu'il est possible d'avoir le beurre et l'argent du beurre dans ce domaine.
Il y a quelque chose d'anormal, pour des gens qui croient au marché, à considérer comme sans importance de ne pas connaître la nature des créanciers. Or le dieu Marché est lié à la déesse Information. Toute la théorie libérale repose sur la libre circulation de l'information : si elle n'est pas fiable et accessible à tous, les acteurs ne peuvent pas faire librement leurs choix. C'est Walras qui le dit, monsieur le rapporteur général – la Macronie est en péril si vous ne connaissez pas votre propre dogme.
Que la France, en particulier le ministre délégué chargé des comptes publics, ne soit pas capable de déterminer qui possède la dette ne vous pose aucun problème. Vous prétendez qu'on en sait assez. Or je pense que c'est une information qu'aimeraient avoir de nombreux députés, quelles que soient leurs opinions politiques. Peut-être que les Français n'ont pas envie d'envoyer plusieurs milliards de leurs impôts vers des pays amis ou non, en tout cas qu'ils n'aiment pas, par exemple les pays du Golfe ou certaines dictatures. Refuser qu'ils le sachent, en renvoyant à des éléments spécieux n'est pas acceptable. Qu'on ne puisse pas avoir ce débat sans se faire insulter est surréaliste : oui, on veut connaître la nationalité des détenteurs de la dette.