La question de l'autonomie des universités est une question bien plus large. Je suis toutefois troublée par les choix des étudiants en médecine : désormais, ils choisissent principalement des spécialités sans garde et la chirurgie esthétique et réparatrice ; cela diffère de ce que l'on connaissait il y a dix ou quinze ans, quand la néphrologie et la cancérologie étaient choisies en premier. Cela dit beaucoup de la façon dont les jeunes veulent travailler. S'il y a de la régulation à faire, c'est sur le choix des spécialités.
Je pense qu'il faut absolument revoir le régime des autorisations. L'accès aux soins doit être vu comme un service public de la santé, auquel le privé doit participer. On ne doit plus donner d'autorisation à des cliniques privées qui non seulement ne participent pas au service public, mais qui, de plus, « déshabillent » les hôpitaux en attirant des praticiens qui n'ont plus aucune obligation de garde – je l'ai constaté en neurochirurgie, qui nécessite de grandes gardes à l'hôpital, une fois par semaine, avec des chirurgiens qui opèrent la nuit, etc. Cela n'est plus possible ! Le secteur privé doit participer à ce bien commun qu'est l'accès aux soins pour tous et le seul outil dont nous disposons pour ce faire, ce sont les autorisations.
Je suis radicalement contre les Ordam. Dans beaucoup de pays fédéraux, le coût de la santé augmente du fait de la compétition entre Länder – ou entre cantons en Suisse, ou entre régions en Espagne. Il existe déjà une compétition entre pays, où ceux qui payent le plus attirent les soignants ; l'Ordam ferait courir le même risque entre régions : c'est la course à celui qui mettra le plus d'argent dans la santé et, à la fin, la santé coûte beaucoup plus cher. De plus, l'offre de soins y est extrêmement mal répartie entre les territoires : les pays fédéraux connaissent une hétérogénéité de la répartition des professionnels. Les Ordam importeraient au sein du territoire national ce que l'on voit déjà à nos frontières : j'y suis radicalement opposée.
Je pense, en revanche, qu'il faut beaucoup plus d'adaptations régionales, avec des missions d'intérêt général (MIG) et des fonds d'intervention régionaux (FIG) à la main des agences régionales de santé, voire des conseils régionaux. Cela doit toutefois s'inscrire dans la vision de l'accès aux soins portée par le ministère : en effet, certains départements et certaines régions ont une vision qui n'est pas suffisamment large, les élus locaux luttant pour obtenir des autorisations qui augmenteront le nombre d'actes non pertinents pratiqués. La vision doit être au moins régionale – certainement pas départementale ! – si l'on veut assurer une bonne qualité des soins partout dans le territoire.