Le groupe Renaissance se réjouit des conclusions de la commission mixte paritaire qui s'est tenue la semaine dernière sur la proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France, à l'issue d'un processus parlementaire à la fois dense et rapide. Déposé en février, ce texte défendu par nos collègues Sacha Houlié, Thomas Gassilloud et Constance Le Grip, fruit du travail collectif mené par la délégation parlementaire au renseignement et nourri par de nombreux travaux, tant académiques que parlementaires, avait en effet été adopté à une très large majorité par cette assemblée le 27 mars. Je salue le travail accompli par notre collègue Constance Le Grip et par le président de la commission des lois, Sacha Houlié, à qui j'adresse toute notre amitié. Le Sénat, quant à lui, a adopté ce texte le 22 mai, après l'avoir travaillé et enrichi.
La conclusion positive de la commission mixte paritaire témoigne du sens des responsabilités et du souci de défendre la souveraineté nationale qui ont présidé parmi les sénateurs et les députés. Le groupe Renaissance salue cet esprit constructif entre les deux chambres, et tient à souligner l'implication forte de la rapporteure du texte au Sénat, Mme Agnès Canayer, dans ce travail de coconstruction. Est-il besoin de redire à quel point la réalité et la dangerosité des ingérences étrangères à l'œuvre dans notre pays appellent une mobilisation collective sans précédent pour les détecter, les entraver, les prévenir et les combattre ? Malveillantes, toxiques, sournoises, souvent – mais pas toujours – dissimulées, elles ont toujours une visée déstabilisatrice et destructrice.
Je rappellerai quelques faits de l'actualité récente. Après les étoiles de David taguées sur les murs de la capitale et de plusieurs communes autour de Paris, après l'ignoble souillure apposée sur le Mur des Justes du mémorial de la Shoah, ce sont de faux cercueils évoquant le prétendu décès de soldats français qui ont été découverts devant la tour Eiffel. Provocation, manipulation, atteinte à la tranquillité nationale, violence psychologique : tels sont les buts poursuivis par les auteurs de ces opérations pernicieuses et toxiques, dont les modes opératoires se ressemblent étrangement, et derrière lesquels peut se deviner la présence de certains services russes opérant sur notre territoire.
Et que dire des opérations de désinformation et de manipulation de l'information et des médias, telles que Doppelgänger et, tout récemment, Portal Kombat, largement documentées par le service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères, Viginum ? Il convient de rappeler aussi l'opération informationnelle de grande ampleur déployée par l'Azerbaïdjan autour des récents événements en Nouvelle-Calédonie, diffusant un narratif viscéralement antifrançais au prétexte de la lutte contre le néocolonialisme. De manière générale, nous devons nous attendre à ce que l'Azerbaïdjan intensifie son action d'ingérence dans tous nos territoires ultramarins.
Ce sont donc plusieurs puissances étrangères – la Russie, la Chine, l'Azerbaïdjan, pour ne nommer qu'elles – qui sont à l'avant-garde d'une stratégie de déstabilisation généralisée de notre démocratie.
Espionnage, cyberattaques, corruption, désinformation et manipulation, captation de certaines élites, ces menaces sont protéiformes, omniprésentes et durables. La France est l'une des principales cibles de cette guerre hybride. Nous n'avons donc pas le choix : nous devons impérativement nous adapter. Cela passe par une réaction rapide et consistante, notamment grâce à un cadre législatif renforcé permettant de prévenir les ingérences étrangères.
Tel est l'objet de la proposition de loi que nous étudions dans sa version finale. Ce texte vise donc à améliorer la transparence en rendant obligatoire la déclaration des activités effectuées pour le compte d'intérêts étrangers. Elle a également pour but de renforcer notre capacité de détection, avec le développement des outils à disposition de nos services de renseignement. Enfin, elle introduit des sanctions pénales et financières participant à un effort de dissuasion.
Au cours de son cheminement législatif, la proposition de loi initiale a été complétée et enrichie. La version finale que nous nous apprêtons à voter est donc le résultat d'un consensus républicain, obtenu par la volonté partagée de nos deux chambres de protéger notre pays et nos concitoyens face à la multiplication des opérations d'ingérence étrangère.
Chers collègues, comment évoquer ce sujet sans conclure par la dimension européenne de ce défi, à quelques jours d'un scrutin européen crucial pour l'avenir de l'Union ? Cette dimension européenne est portée par M. Stéphane Séjourné, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, et M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de l'Europe, et illustre la capacité d'entraînement et la force des propositions présentées par la France.
Lutter contre les ingérences, c'est renforcer la souveraineté française et protéger les démocraties française et européenne. Si cet enjeu se joue dans les urnes dimanche, il se joue aussi dans le vote de cette proposition de loi essentielle. Le Groupe Renaissance la votera donc avec enthousiasme, conviction et détermination.