Nous, législateurs, qui essayons de défendre une société à laquelle nous croyons, et de promouvoir une vision, qui est celle de la fraternité, terme que nous entendons aussi beaucoup, devons-nous proposer comme une solution d'en finir ? Vous répondez que le titre I
Certes, mais comment peut-on honnêtement penser que personne ne sera tenté, plus tard, d'assouplir ce droit à choisir ? Qu'au nom de l'égalité – un terme que nous entendons beaucoup aussi – une personne souffrant d'une autre pathologie ne demandera pas aussi cette aide active à mourir ? Aux Pays-Bas, après de multiples ouvertures, le critère de polypathologie, qui recouvre l'arthrose et même la surdité, représente 16 % des euthanasies.
Vous répétez : que faisons-nous pour ceux dont nous ne parvenons pas à soulager les douleurs insoutenables ? Ils sont peu nombreux ; que faisons-nous ? Personne ici ne peut accepter ces souffrances. Mais les quelques-uns qui ne seraient pas soulagés, ni par les soins palliatifs, ni par une sédation profonde et continue, deviendront par la suite de plus en plus nombreux. Observons la situation dans les pays qui ont légalisé l'euthanasie et le suicide assisté. Je donnerai quelques exemples. En Belgique, en 2002, 24 euthanasies ont été pratiquées ; en 2022, 2 966 ont été réalisées. Au Canada, on est passé de 1 018 en 2016 à 10 064 en 2021. Aux Pays-Bas, en 2002, 1 882 euthanasies ont été réalisées ; en 2021, il y en a eu 7 866. Avons-nous l'outrecuidance de penser que le modèle à la française ne dérivera pas de cette manière ?
Je citerai enfin le rapport de la commission de réflexion sur la fin de vie en France : « La pratique euthanasique développe en effet sa propre dynamique résistant à tout contrôle efficace, et tend nécessairement à s'élargir, avec un curseur qualitatif sans cesse mouvant qui ne revient jamais en arrière. »