Je vais lire fidèlement le discours que les rapporteurs spéciaux pour la recherche Mickaël Bouloux et Jean-Marc Tellier, qui ne peuvent être parmi nous ce soir, ont fait l'honneur de me charger de prononcer en leur nom.
Tout d'abord, nos collègues regrettent que le printemps de l'évaluation se tienne alors que madame la ministre n'a pas répondu aux questions écrites qu'ils lui ont été adressées voilà plus de deux mois sur des sujets majeurs relatifs à la recherche. Deux de ces questions portaient sur les importantes annulations de crédits décidées pour 2024 et la troisième déplorait la situation alarmante de la recherche médicale. Permettez-moi de rappeler les dispositions du sixième alinéa de l'article 135 de notre Règlement : « Les réponses des ministres doivent être publiées dans les deux mois suivant la publication des questions ». Le rapporteur spécial Mickaël Bouloux indique qu'il se réserve le droit de faire usage des pouvoirs que lui confère l'article 57 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances pour procéder à des contrôles sur pièces et sur place pour obtenir des réponses.
L'exécution 2023 de l'ensemble des programmes couverts par notre rapport spécial s'est révélée fidèle, les ratios entre les crédits consommés et ceux adoptés dans la loi de finances pour 2023 (LFI) comme entre les crédits disponibles et les crédits finalement consommés sont proches de 100 %, en AE comme en CP. Nous voulons cependant donner l'alerte quant à la compensation par l'État aux opérateurs de l'augmentation de 3,5 % du point d'indice de la fonction publique effectuée en juillet 2022. Cette compensation n'étant intervenue qu'à partir du 1er janvier 2023, elle a été, entre le 1er juillet et le 31 décembre 2022, à la charge des opérateurs. À combien se chiffre, pour les opérateurs, le coût de cette non-compensation temporaire ?
À la suite de celle-ci n'est intervenue qu'une compensation partielle des nouvelles mesures salariales – bienvenues – pour les fonctionnaires entrées en vigueur entre juillet 2023 et janvier 2024. Quel a été le coût de ces mesures pour les opérateurs ? Quel en a été le coût assumé par l'État ? Ces deux compensations différées ou insuffisantes n'ont-elles pas mis en péril la situation financière des opérateurs, notamment celle des organismes de recherche, déjà fragilisés par le contexte inflationniste ? Nous rappelons que la loi de programmation de la recherche doit apporter des financements additionnels, et donc faire office de compensation de l'inflation.
Nous tenons également à rappeler et à dénoncer le choix politique fait par le Gouvernement de soutenir massivement la recherche sur projets au détriment des financements récurrents pour les organismes de recherche. Les conséquences néfastes de ce choix sont pourtant bien connues : précarité des chercheurs, temps perdu à remplir des dossiers de candidature, manque de vision de long terme, entraves à la liberté de la recherche. Ce n'est pas un hasard si, lors de la crise de la covid-19, la France s'est montrée incapable de concevoir et de commercialiser son propre vaccin.
Enfin, le crédit d'impôt en faveur des dépenses de recherche (CIR) se maintient à un niveau très élevé en 2023, atteignant 7,19 milliards d'euros. Nous estimons, à l'instar de notre collègue rapporteur spécial sur la mission Remboursements et dégrèvements, que les sommes considérables consacrées par l'État à ce dispositif pourraient être utilement réorientées vers les organismes de recherche afin d'augmenter les financements récurrents. Une évaluation ou une modification de ce dispositif est-elle prévue au cours des prochains mois ?