Sur les trois programmes relevant de mon ministère, la consommation des crédits en 2023 s'est élevée à 25,943 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 25,769 milliards d'euros en crédits de paiement (CP), soit une hausse de 1,1 milliard d'euros par rapport à l'exécution 2022 en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement. Cette hausse vient tout d'abord refléter et concrétiser nos priorités.
Une première priorité portait sur la vie étudiante, avec la première étape de la réforme des bourses sur critères sociaux, correspondant au programme 231 Vie étudiante. À la rentrée 2023, le volume des bourses était en hausse de 88 millions par rapport à 2022 et, en tenant compte de l'évolution tendancielle de la dépense, l'impact de la réforme sur le périmètre du programme 231 est estimé à environ 125 millions d'euros de dépenses supplémentaires sur le dernier trimestre 2023. Ces mesures fortes ont permis de mettre un terme à l'hémorragie de boursiers pour aider mieux ceux qui en ont le plus besoin ; elles consistaient en une augmentation à la fois du montant des bourses et du nombre des bénéficiaires. Entre décembre 2022 et décembre 2023, le nombre de boursiers financés par le programme 231 a ainsi augmenté de plus de 13 000, alors que, dans le même temps, les effectifs totaux de l'enseignement supérieur, et particulièrement hors apprentissage, à l'université, ont été en baisse.
Toujours en matière de vie étudiante, l'exécution budgétaire 2023 est aussi marquée par le financement de la pérennisation du repas à 1 euro, soit environ 50 millions d'euros de dépenses sur une année totale, et par la réforme des services de santé étudiante, à laquelle nous avons consacré 8 millions d'euros sur l'année 2023.
En matière de recherche, le déploiement de la loi n° 2020-1674 du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l'enseignement supérieur s'est poursuivi en 2023. Conformément à cette programmation, actée en 2020, les crédits ont été d'environ 370 millions d'euros – 400 millions d'euros avec ceux de la recherche spatiale correspondant au programme 193 Recherche spatiale –, dont 226 millions d'euros sur le programme 172 Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires et 143 millions sur le programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire. Sans entrer dans le détail des mesures de la loi de programmation de la recherche, je souligne que les chercheurs ont été mieux rémunérés et le métier rendu plus attractif, avec environ 92 millions d'euros de revalorisation indemnitaire en 2023 pour les chercheurs et les enseignants-chercheurs, avec aussi un accroissement du nombre de docteurs et de leur rémunération, tandis que le déploiement du dispositif des chaires de professeur junior connaît un réel succès.
La loi de programmation de la recherche, ce sont aussi des chercheurs mieux soutenus et une recherche mieux financée. En témoigne le taux de succès aux appels à projets sur l'appel à projets générique de l'Agence nationale de la recherche (ANR) : il a atteint 24,3 % en 2023, après 24 % en 2022, 22,7 % en 2021 et 17 % seulement en 2020 – mais il était de 10,6 % en 2014. Ce sont ainsi 1 487 projets qui ont été soutenus l'an dernier. Dans le même temps, le taux de préciput, c'est-à-dire le taux lié aux frais de gestion, est passé de 19 % en 2020 à 25 % en 2021, puis à 28,5 % en 2022, pour atteindre 30 % en 2023. Ce sont davantage de moyens pour les établissements, et donc pour les laboratoires.
L'exécution 2023 reflète également l'attention apportée au pilotage des établissements d'enseignement supérieur et à leur performance. La contractualisation entre l'État et les établissements sous tutelle de mon ministère a été rénovée avec les contrats d'objectifs, de moyens et de performance (COMP), qui remplacent le dialogue stratégique et de gestion. Conclus pour une durée de trois ans, ces contrats permettent de porter des projets cohérents avec la stratégie des établissements en contrepartie d'une responsabilisation accrue. Les travaux sur les dix-sept premiers contrats lancés en mars 2023 sont achevés. Au total, plus de 110 millions d'euros sont programmés sur trois ans pour cette première vague.
Mon deuxième point concerne la forte hausse en 2023 des crédits destinés à nos opérateurs, qui est la marque du soutien de mon ministère à ces derniers.
Ce soutien était, tout d'abord, destiné à leur permettre de faire face à la hausse de leurs dépenses salariales en 2023. Les mesures relatives au point d'indice de juin 2022 ont été compensées intégralement à partir de janvier sur l'année 2023, ce qui a représenté 500 millions d'euros de hausse des subventions pour nos établissements. Au titre des mesures dites Guerini de juin 2023, près de 70 millions d'euros en gestion ont été donnés pour les universités et les autres établissements d'enseignement supérieur relevant de mon ministère, et les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous) ont été intégralement compensés. En 2024, la compensation sera d'au moins 50 % pour l'ensemble des établissements, à quoi s'ajouteront des soutiens ciblés alloués aux établissements les plus fragilisés ; les Crous seront, quant à eux, intégralement compensés.
Le soutien était également destiné à leur permettre de faire face aux surcoûts énergétiques. Les établissements de mon ministère ont bénéficié à ce titre d'un fonds exceptionnel de 275 millions d'euros en 2023 : 200 millions d'euros pour les universités, avec un surcoût final estimé à environ 220 millions d'euros par rapport à 2022 et à 320 millions d'euros par rapport à 2021 ; 55 millions d'euros pour les organismes nationaux de recherche, en plus des 22 millions d'euros en toute fin de gestion 2022 pour l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer) et la Flotte océanique française (FOF), l'Institut polaire français - Paul-Émile Victor (IPEV) et le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), puis à nouveau 9 millions d'euros en fin de gestion 2023 pour l'Ifremer et l'IPEV, soit au total 90 millions d'euros consacrés aux organismes, pour des surcoûts estimés à 106 millions d'euros en 2023 par rapport à 2021. Pour les Crous, le surplus a été de 20 millions d'euros et j'ai également fait débloquer une enveloppe additionnelle de 30 millions d'euros en fin de gestion 2023 pour les surcoûts liés à l'inflation et aux prix de l'énergie, soit un total de 50 millions d'euros, pour un surcoût d'environ 60 millions d'euros par rapport à 2022 et de 80 millions d'euros par rapport à 2021. Aujourd'hui, les prix de l'énergie sont orientés à la baisse et nous continuons à suivre l'évolution de nos établissements.
Mon troisième point porte sur les soutiens qui ont permis de limiter la dégradation de la situation financière des établissements relevant de mon ministère. L'année 2023 a cependant marqué une inflexion indéniable de ce point de vue. Plus de soixante universités et établissements d'enseignement supérieur ont présenté une perte comptable, contre trente-neuf en 2022 et dix en 2021. La situation s'est également dégradée pour les organismes nationaux de recherche. Pour les Crous, le soutien important de l'État, avec une subvention pour charges de service public en hausse de 90 millions d'euros par rapport à 2022, a permis une amélioration du résultat par rapport à 2022.
Les réserves, quant à elles, demeurent élevées en 2023 et supérieures aux seuils prudentiels. Fin 2023, la trésorerie des établissements du programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire s'élevait à 5,7 milliards d'euros et leurs fonds de roulement à 3,8 milliards d'euros, tandis que la trésorerie des organismes représentait 2,8 milliards d'euros et leurs fonds de roulement brut 1,5 milliard d'euros. Une partie seulement de ces réserves est libre d'emploi, une partie importante étant fléchée. Je ne dispose pas encore de chiffres actualisés sur la part libre d'emploi fin 2023 – l'enquête est en cours sur la base des comptes 2023, qui viennent d'être publiés. L'an dernier, j'estimais cette part libre d'emploi ou disponible à environ 1 milliard d'euros pour les établissements d'enseignement supérieur – écoles et universités. L'emploi a été dynamique en 2023 sur le programme 150 comme sur le programme 172, avec une hausse de l'emploi sous plafond conforme à la loi de programmation de la recherche.
Au vu de la situation financière, mon collègue Thomas Cazenave et moi-même avons décidé de lancer une mission d'inspection sur le modèle économique des universités, qui doit notamment explorer des pistes pour poursuivre l'accroissement des recettes propres et pour améliorer la gestion financière des établissements, par exemple en facilitant les recrutements ou en simplifiant l'emploi de ces réserves financières. Cette mission commencera ses travaux dans les prochaines semaines.
Même si cela ne concerne pas l'exécution 2023, je sais que vous aurez des interrogations sur les annulations opérées en 2024, et je vais donc faire le point à ce propos.
Les 900 millions d'euros de crédits annulés pour la recherche et l'enseignement supérieur concernent l'ensemble de la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur. À l'échelle des trois programmes dont mon ministère a la responsabilité, ces annulations s'élèvent à 588 millions d'euros et portent essentiellement sur trois points : les réserves de précaution, pour 434 millions d'euros – annulation pour ainsi dire transparente pour les établissements –, des reports de projets pluriannuels immobiliers, d'investissement ou d'équipements de recherche, pour environ 100 millions d'euros, et des ajustements sur les appels à projets et sur la trésorerie de l'Agence nationale de la recherche, mais sans revenir en arrière par rapport au taux de succès atteint en 2023, pour une annulation d'environ 50 millions d'euros au total.
Le budget de mon ministère reste en hausse pour 2024 et, de manière générale, les moyens de fonctionnement de l'ensemble des établissements du ministère – universités, écoles et organismes – sont préservés.
Concernant la recherche, les moyens soclés des organismes sont préservés, ainsi que les mesures touchant aux ressources humaines issues de la loi de programmation de la recherche pour l'ensemble des établissements, tant universités qu'organismes. Le seul point, c'est l'ANR.
Concernant la vie étudiante, l'ensemble des engagements en la matière, qu'il s'agisse du logement étudiant ou de la restauration, seront bien sûr tenus, de même que le versement des bourses sur critères sociaux à l'ensemble des bénéficiaires éligibles, comme le prévoyait la première étape de la réforme. En particulier, le budget du réseau des œuvres n'est pas affecté. Sur ce programme, les annulations portent uniquement sur la réserve de précaution.
Concernant les établissements d'enseignement supérieur et de recherche, seuls des projets immobiliers seront concernés par les reports, à l'exclusion des projets de logement étudiant.
Je ne veux pas minimiser ces annulations, mais l'impact sur 2024 restera faible.
Pour la suite, notamment pour le projet de loi de finances (PLF) pour 2025, le moment n'est pas encore venu de vous en parler, mais je tenais au moins à vous indiquer que sera communiqué d'ici à l'été un bilan quantitatif et qualitatif sur les trois premières années de mise en œuvre de la loi de programmation de la recherche. Il constituera une base de réflexion pour d'éventuelles réorientations, qui devront se lire en lien avec les transformations qui ont déjà été engagées dans le sillage des annonces faites par le Président de la République le 7 décembre sur l'avenir de la recherche.