Ma réponse risque d'en vexer certains mais peu importe… Depuis trente ans, la politique agricole a été largement partagée par le syndicat majoritaire, qui est financé en grande partie par des entreprises de la filière agroalimentaire. J'ai été secrétaire général du CNJA (Centre national des jeunes agriculteurs) à l'époque et je suis donc familiarisé avec ce fonctionnement. Des mesures qui entraîneraient une modification substantielle des textes législatifs se heurtent à un frein syndical. Tous les ministres successifs s'y sont heurtés, volontairement ou non. Ils ont renoncé à certaines mesures pour éviter des mouvements sociaux. La réforme de la prime à la vache allaitante a été compliquée à mettre en œuvre et pourtant elle était nécessaire. Il fallait faire en sorte que les agriculteurs retrouvent une certaine liberté de production et ne soient plus contraints de produire des broutards. Le syndicat majoritaire était hostile à cette réforme car l'attribution des primes à la vache allaitante était pour lui un instrument important : il pouvait promettre des primes aux agriculteurs en échange de leur adhésion. Je pourrais aussi citer à des parlementaires – notamment au Sénat – issus du monde syndical qui ont joué ce jeu.