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Intervention de Laurent de Buyer

Réunion du mardi 9 avril 2024 à 16h30
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté alimentaire de la france

Laurent de Buyer, directeur général d'Axema :

La question est complexe. Pour ce qui est de la décarbonation, le principal sujet me semble être d'abaisser les quantités d'engrais utilisées. Les gains seraient bien supérieurs à tout ce que nous pouvons espérer au niveau des moteurs. Le problème est que seules des contraintes économiques ou réglementaires sont réellement incitatives pour les agriculteurs et qu'à défaut, la massification n'est pas effective. Quelques agriculteurs avant-gardistes adhéreront spontanément à ces nouvelles technologies et permettront aux constructeurs de tester leur matériel mais la massification n'aura pas lieu. Aujourd'hui par exemple, seulement 10 % du parc des pulvérisateurs est performant. Remplacer le matériel est coûteux et les intrants ne sont pas « suffisamment chers » pour que les agriculteurs se préoccupent du sujet, y compris en viticulture – et pourtant je sais que les économies d'intrants pourraient y être conséquentes. Le délai de déploiement de ces technologies s'explique donc par un défaut de rentabilité pour l'agriculteur. L'investissement dans du nouveau matériel est trop élevé par rapport aux économies générées sur le long terme. Quant aux IHM (interfaces hommes-machines), elles ne sont pas toujours simples à utiliser. Il n'est pas facile de se familiariser avec le fonctionnement d'une machine que l'on n'utilise que deux ou trois fois par mois. Certaines fonctions pourraient être automatisées.

L'autre problème est que nous avons sous-estimé la gravité du problème. Lorsque nous avons évoqué la réduction des dosages auprès de l'INRAE (Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement), nos interlocuteurs nous ont alertés sur la nécessité à terme de supprimer les produits chimiques, en particulier dans la culture de la betterave, car les sols sont déjà fortement pollués. Nous manquons de données sur le biotope, ce qui inquiète de nombreux acteurs. Nous aimerions arrêter d'utiliser les produits chimiques mais nous ne savons guère comment faire. Il faudrait dans le même temps arrêter de compacter les sols. Nous voyons un mur se dresser devant nous et la masse de travail pour le surmonter est gigantesque et très onéreuse.

Le problème avec les subventions est qu'elles portent sur des produits communs et n'ont pas été conçues pour accompagner des transitions. Nous devons faire en sorte de promouvoir de nouvelles techniques. Nous allons devoir choisir dans quels domaines focaliser nos efforts pour pouvoir parvenir à des effets mesurables. Dans le domaine des pulvérisateurs, avec 2 000 machines, nous économiserions des tonnages importants. Malheureusement, les pulvérisateurs ne sont pas concernés par le prochain dispositif subventionnel.

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