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Intervention de Marisol Touraine

Réunion du mercredi 22 mai 2024 à 16h00
Commission d'enquête sur les difficultés d'accès aux soins à l'hôpital public

Marisol Touraine, ancienne ministre des affaires sociales et de la santé :

J'ai toujours considéré que les décisions des ministres avaient un impact et pouvaient me conduire, si ce n'est à rendre des comptes devant la justice, du moins à rendre compte de mon action devant l'opinion. Je n'ai jamais pensé que j'exerçais une fonction secondaire, que je prenais des décisions inapplicables ou que j'agissais comme une marionnette. Je ne comprends pas qu'un conseiller puisse dire de telles choses, de surcroît s'il s'exprime anonymement. Je porte un jugement très sévère sur ce type de propos. Je n'ai jamais pris une décision en pensant qu'elle ne produirait peut-être aucun effet. Je n'ai jamais reculé devant la difficulté, qu'elle soit politique, technique ou autre : mes interlocuteurs de l'époque vous le diront. Je n'étais pas une interlocutrice toujours facile, mais, au moins, j'étais honnête et je tenais parole.

La logique de la loi du 30 mai 2013 portant réforme de la biologie médicale consistait à permettre la fusion entre certaines structures et à privilégier la sécurité et la qualité des examens de biologie. L'objectif n'était pas d'arriver à une situation irréversible caractérisée par l'existence de six groupes.

Je ne sais pas pour quelle raison exacte l'enfant dont vous avez parlé est décédé – il arrive malheureusement aussi que des bébés meurent dans de grands hôpitaux, situés à cinq minutes du domicile familial. Il n'en reste pas moins que la question du maillage territorial est centrale. Elle passe par la coopération inter-hospitalière, mais également par la structuration des liens entre la ville et l'hôpital – cette structuration a été au cœur de la stratégie nationale de santé et a fait l'objet d'une série de mesures, parmi lesquelles le Pacte territoire santé, qui a apporté des moyens financiers au développement des maisons de santé, et le déploiement du numérique, qui en était alors à ses débuts. L'ensemble des outils actuels, tels que les communautés professionnelles territoriales de santé ou les lettres de liaison ville-hôpital, ont été créés à cette époque.

La qualité des relations entre les médecins de ville et l'hôpital, qui est très variable selon les territoires, est l'un des facteurs contribuant, dans un sens ou dans un autre, à l'offre de soins dans un territoire. Lorsque les relations sont bonnes, une dynamique s'installe.

Il n'y a pas eu de « décennies d'inaction ». Pour ce qui me concerne, aucune des décisions structurantes prises entre 2012 et 2017 n'a été remise en cause. Depuis lors, je peine un peu à voir ce qui a été fait en matière de structuration. Les groupements hospitaliers de territoire, les communautés professionnelles territoriales de santé, les maisons de santé, la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp) se mettent en place. L'augmentation de 650 places du numerus clausus s'est appliquée surtout par la suite.

La suppression de la permanence des soins a été une mauvaise mesure, mais je n'avais pas les moyens politiques de la rétablir. Mes relations n'ont pas toujours été simples avec les professionnels libéraux ; je constate que cela n'a pas évolué depuis lors.

Les grandes orientations stratégiques sont définies par le ministre, avec l'appui du gouvernement, et les agences régionales de santé appliquent les politiques décidées. Les agences régionales ont été très contestées, en particulier pendant la crise de la covid-19, et continuent à l'être aujourd'hui. Pour ma part, je les défends, car beaucoup de gens formidables y travaillent, qui ont pour seule préoccupation de faire fonctionner les choses. Elles sont, certes, d'une qualité inégale et n'ont pas toutes le sens des relations avec les élus et la capacité à sentir des évolutions de terrain. Lorsque j'étais ministre, le niveau des directeurs d'agence était globalement excellent, mais celui des délégués départementaux était beaucoup plus variable – on me dit qu'une professionnalisation a été engagée, mais je ne sais pas si c'est vraiment le cas. L'échelon départemental est important, car c'est là que se tisse le contact avec les élus. Cela étant, on peut prendre de bonnes décisions en l'absence d'un cadre très structuré et formel : il suffit que le directeur de l'agence, éventuellement le préfet, ainsi que des élus et des professionnels de santé se mettent autour d'une table. Il ne faut pas balayer d'un revers de main la capacité d'innovation et d'imagination à l'échelon local. Le ministère doit aussi faciliter l'impulsion de ces initiatives.

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