Les cinq dernières années ont vu de grandes réalisations en Europe : les leaders européens ont fait preuve d'une grande lucidité mais ils ont surtout réagi à des crises. Je pense pour ma part qu'il faut mettre l'accent sur des plans, des actions, raison pour laquelle j'en reviens à la « méthode Delors ». En effet, les grandes réalisations européennes, comme le marché unique, l'union économique et monétaire, la politique de cohésion, n'étaient pas le fruit d'une réaction face à une crise immédiate mais une vision qui nous a offert la possibilité de résister dans cette compétition globale qui a tellement changé au fil des années.
À cet effet, mon rapport est donc bien conçu comme une boîte à outils. Il reviendra ensuite à la volonté politique des gouvernements et des forces politiques qui seront majoritaires au Parlement européen d'opérer des choix. Dans ce rapport, j'ai bien souligné que, dans un monde qui évolue très rapidement, où les autres montent en puissance, l'inertie nous condamne au déclin. Nous avons vécu vingt ans d'émergence de la Chine et je pense pouvoir affirmer que nous allons connaître vingt ans d'émergence de l'Inde. Or ces changements sont liés à des dimensions que nous ne pouvons mener seuls. Il nous faut agir ensemble, sans effacer les particularismes nationaux. J'ai toujours apprécié les propos de Jacques Delors sur la « fédération d'États-nation ».
Ensuite, j'estime que si nous ne sommes pas en condition d'avoir un marché commun de la défense, nous n'aurons jamais une Union de la défense. Je le dis d'autant plus facilement que je suis issu d'un pays dont les traditions militaires et l'appréciation de la défense sont très différentes de celles qui ont cours en France. Aujourd'hui, nous avons besoin d'une forte défense, à la fois avec nos alliés américains mais aussi en propre, grâce à une capacité de défense européenne qui n'est pas satisfaisante actuellement.