Elle est importante par le budget qui lui est consacré chaque année : 640 milliards d'euros en 2024. C'est un investissement massif, mais indispensable. Elle est importante par l'universalité des personnes qu'elle protège – tous les Français – et, surtout, par ses valeurs et ses principes fondamentaux, que nous devons préserver avec vigilance – la solidarité, l'universalité et la redistribution.
En tant que ministre délégué chargé de la santé et de la prévention, je suis profondément attaché à ces valeurs. Elles sont le socle de notre modèle social et l'assurance que chaque Français pourra accéder à des soins de qualité, quelle que soit sa situation.
Face aux défis actuels, notamment le vieillissement de la population, l'augmentation des maladies chroniques, mais aussi les crises sanitaires, notre système de sécurité sociale doit s'adapter sans jamais renoncer à ses fondements.
Monsieur le rapporteur, vous l'aurez compris, nous avons la sécurité sociale en partage. J'approuve donc votre souhait de préserver ce modèle, mais il fait déjà l'objet d'une protection au plus haut niveau de la hiérarchie des normes.
La Constitution garantit en effet l'existence d'un système de protection sociale collective. Elle prévoit d'ailleurs explicitement son existence dans son article 34, et implicitement aux articles 39, 42 et 47-1, relatifs aux lois de financement de la sécurité sociale. Les alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution de 1946, qui fait partie du bloc de constitutionnalité, garantissent également l'existence de ce système.
En outre, cette protection constitutionnelle a été reconnue et utilisée par le Conseil constitutionnel, dont les décisions attestent de son effectivité. Sans faire un cours de droit constitutionnel, ni de juridisme pour le plaisir, je rappellerai simplement que la jurisprudence du Conseil, constante en la matière, est protectrice pour la sécurité sociale. Qu'il s'agisse de vieillesse, de maladie, d'accident du travail ou de famille, il s'est montré très clair, garantissant notamment « la mise en œuvre d'une politique de solidarité nationale en faveur des travailleurs retraités » ou le droit à la protection de la santé.
De son côté, la rédaction de votre proposition de loi est très ambiguë, et a priori sans effet. La notion d'institution fondamentale, inscrite dans votre texte, n'est pas présente dans la Constitution. Il s'agirait donc d'introduire une nouvelle notion, de nature à créer une hiérarchie entre les institutions de la République.
Les missions assignées à cette institution sont en outre particulièrement larges et mal définies puisqu'elle devrait assurer chaque « membre de la société » contre l'ensemble des risques et aléas de l'existence. La distinction entre risque et aléa n'est pas davantage précisée, ni la nature de ces risques et aléas, qui pourraient aller bien au-delà des seuls risques sociaux et collectifs.
Votre dispositif prévoit que la sécurité sociale « concourt en particulier à la mise en œuvre des principes énoncés au dixième et onzième alinéas du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. » Une telle précision n'apporte aucune plus-value puisque ces principes sont déjà énoncés et ne sont pas modifiés.
Enfin, votre proposition de loi constitutionnelle vise à imposer à la fois une forme et un niveau constitutionnalisés de garanties sociales, mais elle présente certains effets de bord qu'il ne faut pas sous-estimer.