Ce geste par lequel nous nous assurons mutuellement des droits tout au long de l'existence, face aux aléas de la vie. Ce geste par lequel on se soigne, on goûte à la retraite, on affronte un accident du travail ou une maladie professionnelle, on subvient à l'éducation des enfants. « Ce qu'elle donne aux Français ne résulte pas de la compassion ou de la charité, elle est un droit profond de la personne humaine. » Voilà ce qu'Ambroise Croizat disait de la sécu, comme on l'appelle par son petit nom, parce qu'elle nous est familière, parce qu'elle nous appartient, parce qu'elle est notre bien commun. Et pourtant, elle ne figure que dans un recoin de notre loi fondamentale, comme par raccroc, et elle n'y figure que pour ce qu'elle coûte, dans la description de la tuyauterie des lois de financement. Où est le sens, où sont les principes, où est l'ambition ?
Cette anomalie nous a sauté aux yeux lors d'une tentative de remplacer l'expression « sécurité sociale » par « protection sociale » il n'y a pas longtemps. La sécurité sociale n'est-elle pas, depuis la Libération, une institution fondamentale de la République, une traduction essentielle de la république sociale ? Il ne surprendra personne que nous souhaitions la protéger et même la proclamer, non pas au nom du passé, mais au nom de l'avenir.