L'accord portant sur la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale marque une grande victoire dans la lutte contre la triple crise planétaire : dérèglement climatique, perte de biodiversité et pollution. Car les écosystèmes marins sont en grand danger, menacés par l'effet combiné des pollutions plastiques, de l'acidification, de la surpêche, des marées noires et de l'extraction minière. Des produits chimiques toxiques et des millions de tonnes de déchets plastiques les dégradent : selon les estimations des Nations unies, d'ici à 2050, il pourrait y avoir plus de plastique dans la mer que de poissons si aucune mesure n'est prise. Chacun sait que la haute mer représente 60 % de l'océan et qu'elle couvre près de la moitié de la planète. La protection de la haute mer est donc devenue l'une des principales préoccupations de la communauté internationale. C'est dans ce contexte que s'est imposée la nécessité d'adopter un instrument juridique contraignant qui permette de protéger efficacement l'écosystème marin des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. Jusqu'à la conclusion de l'accord, ces zones de haute mer ne disposaient d'aucune protection spécifique. Voilà pourquoi il s'agit d'une victoire.
C'est aussi bien évidemment, les collègues l'ont rappelé, une victoire pour le multilatéralisme au profit de la protection de l'environnement et de la biodiversité. Après vingt ans de discussions et de négociations, l'accord adopté au siège des Nations unies le 19 juin 2023 et signé par la France à New York, le 20 septembre suivant est le fruit d'un travail acharné des États du monde entier en faveur de ce projet commun. Les ratifications de soixante pays sont nécessaires afin que l'accord entre en vigueur et produise des effets juridiques. Nous sommes les premiers parlementaires d'un État de l'Union européenne, il faut le rappeler, à nous prononcer sur la ratification de ce texte. Et je tiens ici à saluer le travail de M. le ministre Hervé Berville et son implication pour une ratification rapide de la France au regard de ce sujet essentiel et urgent.
La protection des fonds marins a fait l'objet de nombreuses discussions nationales et internationales ces dernières décennies. En juin 2023, le Conseil de l'Europe adoptait une résolution soulignant l'urgence de protéger les mers et les océans face aux défis environnementaux et aux impacts de la guerre, encourageant notamment la création d'aires marines protégées comme le prévoit le texte sur lequel nous nous prononçons aujourd'hui – j'en profite pour saluer tous les collègues présents dans la délégation française au Conseil de l'Europe. La France, quant à elle, s'est mobilisée et a joué ces dernières années un rôle majeur en faveur de la protection des océans et des écosystèmes marins : disposant de la deuxième plus grande zone économique exclusive au monde, elle s'est inscrite avec vingt-cinq autres pays dans une alliance contre l'exploitation minière en eau profonde ; l'Assemblée nationale s'est prononcée pour un moratoire sur l'exploitation minière des fonds marins dans une résolution adoptée le 17 janvier 2023.
Le traité que nous sommes invités à ratifier aujourd'hui est donc nécessaire. Trois grandes avancées sont à noter dans ce texte.
Il permet d'abord la protection de l'environnement marin, en donnant aux États la possibilité de créer, en concertation avec l'ensemble des parties prenantes et avec un organe scientifique dédié, des outils de gestion par zone et des aires marines protégées. Ces aires marines protégées permettent de maintenir et de restaurer la biodiversité en prenant en compte des critères comme la santé des écosystèmes ou la préservation des ressources halieutiques. Cet outil est reconnu par les scientifiques comme l'un des plus efficaces pour permettre aux océans de se régénérer et pour les protéger. Le texte pose également l'obligation de réaliser des évaluations d'impact environnemental en amont de toute activité humaine en haute mer susceptible de causer des dommages d'une certaine gravité au milieu marin.
Il permet par ailleurs une meilleure gestion des ressources génétiques marines, en prévoyant un partage juste et équitable des avantages, y compris monétaires, découlant de leur utilisation. Enfin, il favorise le développement des pays côtiers en organisant le transfert de technologies marines et le renforcement de leurs capacités en impliquant au maximum les peuples autochtones.
Toutes ces dispositions seront nécessaires pour tenir l'ensemble de nos engagements internationaux en faveur de la protection de la biodiversité marine, notamment ceux pris lors de la COP15 sur la diversité biologique et dans l'accord de Kunming-Montréal. Le texte qui nous est soumis est essentiel dans notre stratégie environnementale. Il permet de concrétiser notre ambition et réaffirme la volonté commune de protéger 30 % des océans d'ici à 2030. En conséquence, le groupe Horizons et apparentés votera en faveur de la ratification de ce traité.