La France est passée maîtresse dans l'art du vaudeville : cela prêterait à sourire si cette singularité se limitait au théâtre. La gestion du dossier de sauvetage de notre géant informatique national Atos laisse entendre que ce style burlesque trouve à s'exprimer dans le monde des affaires : claquements de portes, revirements intempestifs, valse des acteurs et j'en passe.
Quelque 5 milliards de dette, démissions à répétition de ses dirigeants, rien ne va plus pour ce groupe, pourtant essentiel à notre souveraineté numérique et à notre stratégie de défense. L'activité infogérance gère une masse considérable de données sensibles de nos administrations et services publics – Trésor public, carte vitale, caisses d'allocations familiales, SNCF, pour ne citer que les plus connus. La division supercalculateurs participe quant à elle à la mise à niveau opérationnelle de notre dissuasion nucléaire.
Ce groupe à portée stratégique est au bord de la faillite, sans que le Gouvernement et la présidence de la République n'aient manifesté une volonté affichée de le sauver coûte que coûte. Les perspectives de résolution qui se profilent laissent entrevoir l'arrivée de fonds de pensions étrangers et une vente à la découpe des divisions du groupe. Cette solution n'est pas admissible quand le régalien et notre souveraineté nationale sont en jeu.
Monsieur le Premier ministre, entendez-vous procéder à la recapitalisation rapide d'Atos, à concurrence d'un tiers de la dette, afin d'éviter sa liquidation à court terme et mettre fin au projet de démantèlement du groupe ? À quand la mobilisation d'un véritable fonds souverain national, susceptible de maintenir sous pavillon français ces entreprises de portée stratégique, qui subissent la prédation de fonds étrangers ?
La passivité de l'exécutif sur ce dossier pourrait donner lieu à une nouvelle affaire d'État, après Alstom et Technip ; il ne tient qu'à vous qu'il en soit autrement.