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Intervention de Rodrigo Arenas

Séance en hémicycle du mardi 28 mai 2024 à 9h00
Questions orales sans débat — Lutte contre le racisme

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRodrigo Arenas :

Si vous vous plaisez à dire que notre pays est une terre d'accueil pour les capitaux étrangers ou encore pour les touristes venus du monde entier, nous vous entendons beaucoup moins parler de tous ces jeunes qui s'y sentent moins bien accueillis et qui vont même jusqu'à quitter notre territoire, parfois définitivement. Des publications universitaires disent le sentiment de malaise ressenti par un nombre grandissant de Françaises et de Français, qui ne trouvent plus leur place en France alors qu'ils sont pourtant chez eux. Le mal-être de nos concitoyens, je l'entends aussi dans ma circonscription.

Madame la ministre déléguée chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation, chers collègues, Paris n'a pas attendu les Jeux olympiques et paralympiques (JOP) pour être une ville-monde. La mixité culturelle de notre capitale est estimée à environ 20 % de population d'origine étrangère. Dans une partie de ma circonscription, elle atteint même les 30 %. Pourtant, j'entends monter des rues populaires, des quartiers cosmopolites, l'inquiétude croissante de certaines familles, qui me disent que leurs fils ou leurs filles ont décidé de tenter leur chance à l'étranger – aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Australie, dans les pays de la péninsule arabique, soit autant de pays où ils peuvent compter sur leur mérite, quelle que soit leur origine. Chez nous, les chiffres sont sans appel : 1,2 million de personnes subissent une discrimination ou une atteinte à caractère raciste ou antisémite chaque année. Dans mon territoire, les jeunes issus de l'immigration ne trouvent pas de logement ou d'emploi parce qu'ils subissent une discrimination liée à leur patronyme ou à leur faciès.

Selon l'Institut Montaigne, que le Gouvernement n'accusera certainement pas d'islamo-gauchisme, les hommes perçus comme musulmans par les employeurs ont jusqu'à quatre fois moins de chance d'obtenir un entretien d'embauche que les candidats perçus comme chrétiens – ces qualifications ne devraient évidemment pas avoir de sens dans notre République, mais les études attestent qu'elles en ont, malheureusement, au quotidien. Dans son livre Les épreuves de la vie, le sociologue Pierre Rosanvallon, professeur au Collège de France, souligne l'amertume et les dommages psychologiques que ces discriminations causent à nos concitoyens.

Le racisme du quotidien a aussi un coût financier, dont on parle trop peu. Quand on sait qu'un enfant qui grandit en bonne santé et reçoit une éducation convenable coûte en moyenne 180 000 euros jusqu'à ses vingt ans, on ne peut s'empêcher de penser, quand on le voit quitter l'Hexagone, que c'est un terrible gâchis, y compris économique. Ce racisme, diffus mais quotidien, empêche les individus d'exploiter leur potentiel économique et éloigne de la France des jeunes qui mettent leur talent au service d'autres pays, moins regardants sur leur origine. D'après France Stratégie, si nous réduisions les discriminations raciales dans l'accès à l'emploi, dans le travail et dans l'éducation, notre pays pourrait gagner jusqu'à 1,5 point de PIB au cours des vingt prochaines années. D'autres calculs estiment à près de 10 milliards d'euros le manque à gagner chaque année du fait de ces talents gâchés. L'État investit et forme une jeunesse qui souffre de discriminations et qui, faute d'embauche, malgré ses compétences, ne contribue pas à produire la richesse nationale. Ainsi le coût de nos intolérances est-il devenu une charge économique.

Madame la ministre déléguée, vous qui êtes chargée de l'économie avec Bruno Le Maire, à qui s'adressait initialement cette question, comment vous assurerez-vous que des moyens seront fléchés vers le plan national 2023-2026 de lutte contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations liées à l'origine ? Plutôt que de mener à la hache des coupes budgétaires aveugles et de faire les poches des plus précaires,…

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