Le problème, c'est que votre projet de loi est profondément déséquilibré : dans sa version initiale, quatre articles traitaient des soins palliatifs, dix-sept de l'aide à mourir. Plutôt que de vous atteler à rendre effectif le droit d'accès aux soins palliatifs institué par la loi du 9 juin 1999, et à revaloriser cette branche qui manque cruellement de personnel – le rapport d'information du Sénat sur les soins palliatifs rendu en 2021 montrait que le secteur est en berne –, vous la noyez dans un grand tout renommé « soins d'accompagnement ». Les débats en commission ont révélé la grande confusion qu'introduit cette nouvelle dénomination qui, tantôt englobe les soins palliatifs, tantôt se distingue d'eux – nous avons du mal à suivre.
Quatre présidents d'instance de professionnels de santé, dans une tribune publiée le 25 avril dans le journal Le Monde, ont alerté sur les conséquences de ce changement de terminologie, qui ne se réduit pas à une question sémantique : « Nous refusons de requalifier à la française une discipline reconnue à la fois au niveau national et international, pour une raison d'opportunité politique. […] Ce changement de dénomination, loin de représenter une avancée, constituerait un pas en arrière inédit ouvrant à des conséquences non maîtrisables. » Les soins palliatifs font l'objet d'un consensus international ; leur pratique est encadrée, on l'a dit, par des référentiels aussi bien internationaux que français. Avec les « soins d'accompagnement », la France s'isolerait en usant d'un concept inconnu, au détriment du développement des soins palliatifs.
Cependant, personne n'est dupe. Le titre Ier n'apporte rien ; il donne l'impression d'une caution destinée à mieux faire passer la légalisation de l'euthanasie et du suicide assisté au titre II. Il est urgent d'écouter les professionnels de santé, qui sont plus de 800 000 à vouloir conserver l'appellation de « soins palliatifs ».