Vous avez fait le lien entre la capacité pour les agriculteurs de vivre dignement de leur travail et la part de leur budget que nos concitoyens peuvent consacrer à l'alimentation. Ce lien n'est pas forcément évident. On sort d'une crise d'hyperinflation, à la faveur de laquelle un certain nombre d'acteurs – qui ne sont évidemment pas les agriculteurs – ont amélioré leur taux de marge. L'alimentation n'a jamais été aussi chère, en particulier les produits frais, et pourtant les agriculteurs subissent une crise extrêmement grave de leurs revenus. La hausse des prix facturés aux consommateurs n'est pas en soi une garantie de juste rémunération du travail des agriculteurs.
On parle finalement assez peu dans le débat public du taux de marge de l'industrie agroalimentaire et d'autres intermédiaires, qu'il soit connu ou caché grâce à des pratiques comptables. Si le système que nous essayons de comprendre depuis quelques semaines ne change pas, ce n'est pas parce que les consommateurs paieront plus cher que les agriculteurs seront mieux rémunérés.
Ne craignez-vous pas de vous aliéner les consommateurs – souvent mal rémunérés eux aussi – s'ils constatent que les prix qu'ils paient augmentent sans pour autant que les producteurs bénéficient de cet argent ? Ils seraient pourtant disposés à le faire s'ils en avaient la garantie. Mais ils se rendent bien compte que ce n'est pas le cas.
Avec les beaux jours, on voit arriver sur les marchés des asperges et des fraises produites en France dont les prix sont élevés alors que, dans le même temps, des reportages montrent que leurs producteurs ne s'en sortent pas. Nous sommes très bien payés comme députés et je peux m'offrir des fraises. Mais j'essaie de me mettre à la place des familles qui voudraient le faire et je ne vois pas comment elles peuvent acheter deux barquettes de 500 grammes à 5,95 euros.