Le 7 mars, nonobstant le conflit en Ukraine, les Américains ont avisé les partenaires russes de la probable commission d'un attentat dans une salle de concert. Les Russes ont démantelé une cellule début mars, croyant peut-être qu'il s'agissait de celle signalée par les Américains.
Le 28 mars, l'État islamique a renouvelé son appel à la violence et à commettre des attentats pour fêter, avec un peu d'avance, le dixième anniversaire de la proclamation du califat en Syrie, en juin 2014. La date du 28 mars coïncide avec une fête religieuse au cœur du ramadan et bénéficie de surcroît de la réussite de l'attentat de Moscou.
Le quatrième facteur est l'activisme de la wilaya de Turquie de l'État islamique. Sans être en Europe, la Turquie en est très proche, ce qui offre des capacités de projection et de dissimulation. À la chute du califat, en mars 2019, plusieurs centaines de combattants de l'État islamique ont constitué la wilayat de la Badiya, dans une zone désertique de la Syrie où l'on situe le commandement de l'État islamique. D'autres se sont réfugiés en Turquie, où ils ont créé une wilaya, considérée par les services de renseignement comme une base arrière logistique.
Le cinquième facteur est le ciblage de l'Europe, notamment de la France, dans le discours de l'État islamique et d'Al-Qaïda au sein de la djihadosphère. Les autodafés du Coran en Suède et au Danemark ainsi que les prises de position européenne et française en faveur d'Israël à la suite de l'attaque du Hamas sont des marqueurs forts utilisés pour fédérer les gens. L'Europe et les États-Unis sont des cibles. En février, Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa) a diffusé une vidéo appelant spécifiquement à cibler les Israéliens, les Anglais et les Français.
Cette propagande est ciblée. Elle utilise des moyens modernes. Elle s'attaque à une population captive et malléable. Les 20 % d'individus connus des services souffrant de troubles mentaux sont particulièrement perméables à ce discours. Les moyens de le contrer sont peu efficaces : un site internet détruit est reconstitué en miroir une demi-heure plus tard. Or il s'agit de la première source d'inspiration pour les djihadistes.
Avant de céder la parole, j'évoquerai la menace qui pèsera sur les JOP à compter de l'arrivée de la flamme, le 8 mai. La France a accueilli la coupe du monde de rugby sans alerte particulière. Elle accueillera les JOP de juillet à septembre. Elle sait gérer les rassemblements de masse. Il faudra héberger les équipes, les accompagnants et les soutiens, soit plusieurs dizaines de milliers de personnes. Plus de 20 000 journalistes et de 11 à 14 millions de touristes sont attendus, partout en Île-de-France et sur huit sites en province. Il y a donc un intérêt, pour l'État islamique et Al-Qaïda, à commettre un attentat ou à se manifester.
Aucune de ces centrales n'a évoqué les JOP à ce jour. Il n'y a pas eu d'appel à commettre des attentats pendant cette période ni à cibler telle ou telle délégation. Toutefois, les services estiment que la probabilité d'un attentat est accrue. Tous sont mobilisés, en partenariat avec nos homologues étrangers.
Des dispositions ont été prises pour cette période et pour les semaines qui précèdent. La CNRLT a beaucoup travaillé à coordonner ces actions au préalable. Nous espérons être prêts et capables de prévenir toute menace. Pour nous, le risque principal est endogène et certainement inspiré par l'État islamique.