En cette année d'élections européennes, il est urgent que la France porte une autre voix. Nous en voyons les conséquences ces derniers jours en Tunisie : la politique d'externalisation des frontières n'a fait que renforcer un régime autoritaire. Il y a un an, le président tunisien Kaïs Saïed – qui depuis son élection a peu à peu détricoté la démocratie acquise en 2011 par le peuple tunisien – a dénoncé « une invasion migratoire visant à altérer la démographie tunisienne ». Il reprenait alors, presque mot à mot, la théorie raciste du grand remplacement. Depuis, les migrants subsahariens vivent un enfer en Tunisie. Ils sont privés de logement et de travail et ils sont parqués dans des camps informels dans des champs ou des zones désertiques. L'été dernier, près d'un millier d'exilés ont été transportés aux frontières de l'Algérie et de la Libye, dans des conditions caniculaires. Au moins 27 migrants sont morts.
Malgré tout cela, et en pleine connaissance de cause, l'Union européenne a négocié un deal avec la Tunisie pour la gestion des frontières. La France n'a rien fait pour l'empêcher. Pourquoi ?
Quiconque critique le régime autoritaire se retrouve en prison : des membres d'organisations non gouvernementales (ONG) avec lesquelles l'Europe et la France travaillent régulièrement, des journalistes ou des avocats, tels que Sonia Dahmani, violemment arrêtée ce week-end et à qui j'adresse tout mon soutien. Au moment où nous parlons, une soixantaine d'opposants restent en prison. Avez-vous discuté de la situation avec votre homologue tunisien ? Si celle-ci persiste, continuerez-vous de participer activement à l'entreprise illégale de Kaïs Saïed à travers les accords européens ?