Monsieur le ministre, nous vous remercions de venir nous voir dans cette journée bouleversée. Ce qui se passe aux antipodes est impressionnant et la convocation cet après-midi par le président de la République du Conseil des ministres, qui nous a empêchés de nous réunir plus tôt, est justifiée.
Je voudrais commencer par vous parler de notre audiovisuel extérieur.
Le Sénat a adopté une proposition de loi, transmise à l'Assemblée, à laquelle le Gouvernement a greffé, par amendement fleuve, un projet de loi « sauvage ». Cette façon de procéder incompréhensible a provoqué une forte émotion au sein de notre commission.
Sur la forme, les délais d'examen sont invraisemblables, puisque la commission des affaires culturelles et de l'éducation, saisie au fond depuis vendredi dernier, a voté hier soir, avant un examen en séance publique prévue la semaine prochaine. Or c'est là une immense affaire et l'audiovisuel extérieur relève des compétences de notre commission. En outre, nous ne disposons pas d'avis du Conseil d'État et il n'y a pas eu d'étude d'impact. Or, d'après certaines informations, la fusion serait très coûteuse. Comme je l'ai signalé en conférence des présidents, en présence de la ministre déléguée en charge des relations avec le Parlement, cette procédure est chaotique et injustifiée. La commission des affaires culturelles et de l'éducation a voté hier et nous n'avons absolument pas eu voix au chapitre.
Sur le fond, il y a eu un revirement du Gouvernement, à propos duquel j'enquête – à la manière d'Hercule Poirot – car nous manquons d'informations. Le Gouvernement s'était engagé à ce que l'audiovisuel extérieur ne soit concerné ni par la création de la holding regroupant les opérateurs de l'audiovisuel public, ni par la fusion des sociétés constitutives de la holding, prévue un an plus tard. Mme Marie-Christine Saragosse, présidente-directrice générale de France Médias Monde, m'avait fait savoir mardi que cette option avait été approuvée par son conseil d'administration. Or, en fin de semaine dernière, Mme Rachida Dati, ministre de la culture censée déposer un amendement en ce sens, a changé son fusil d'épaule. Nous voici donc face à la perspective d'une modification radicale de la situation de l'audiovisuel public extérieur, sans aucune information préalable, sans aucune consultation, formelle ou informelle de notre commission, et donc sans aucune concertation possible.
Face à cette situation pénible, nous avons essayé de procéder comme nous le pouvions. Des députés des groupes Démocrate et Renaissance, notamment Mme Béatrice Piron, ont déposé en commission des affaires culturelles et de l'éducation un amendement visant à soustraire l'audiovisuel extérieur à la holding. Cela a donné lieu à des échanges compliqués avec le Gouvernement. Les services du premier ministre et de la ministre de la culture semblaient en décalage, ce qui paraît inquiétant : Mme Rachida Dati était contre cet amendement, qui a néanmoins été voté hier après-midi.
Liesse : nous avions, pour l'instant, soustrait l'audiovisuel extérieur au projet de holding ! Mais il n'échappe pas pour autant au projet de fusion. Nous restons donc préoccupés et l'ensemble des représentants des groupes, y compris les groupes de la majorité, à l'occasion du bureau de la commission que j'ai réuni aujourd'hui, s'est indigné de la procédure et s'est solidarisé avec la proposition d'amendement que je déposerai pour veiller à ce que l'audiovisuel extérieur soit également soustrait au projet de fusion.
La situation est sérieuse, la procédure et le fond se conjuguant avec une certaine gravité. Votre anté-prédécesseur, M. Jean-Yves Le Drian, m'avait confirmé à titre personnel au téléphone – avec sagacité – que l'audiovisuel extérieur devait rester à l'extérieur. Êtes-vous en mesure de nous donner des assurances quant à l'attitude finale du Gouvernement, qui jusqu'à présent ne nous est apparue ni très constante, ni très claire ?