Intervention de Pierre Dharréville

Réunion du mercredi 15 mai 2024 à 15h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Dharréville :

J'aimerais partager les questionnements et les objections qui me semblent devoir être opposés. La gravité du sujet qui nous occupe appelle le doute.

Le projet de loi qui nous est proposé marque une rupture éthique. C'est une position politique que je prends, de gauche et communiste, et si je sais qu'il peut y en avoir d'autres. Nous partageons tous le même refus radical de la souffrance. Je ne crois pas que cette nouvelle possibilité d'abréger la vie constitue un soin, un progrès social ni un progrès fraternel. La loi actuelle permet de répondre à la quasi-totalité des situations mais on ne lui en n'a pas donné les moyens. Lorsque les personnes sont bien prises en charge et bien accompagnées, la demande de mort disparaît le plus souvent.

Nous sommes tous traversés de pulsions de mort, de pulsions de vie, parfois au même moment. Alors que la solution actuellement proposée par la société est celle de l'accompagnement, la question sera désormais posée : à partir de quand une vie ne vaut-elle plus d'être vécue ? C'est un basculement qui a une dimension anthropologique vertigineuse. Chacun sera renvoyé à son propre choix, à sa propre solitude.

Je ne pense pas que ce que vous proposez soit une solution. Je crois à l'égale dignité des personnes, quel que soit leur état de santé. Je ne crois pas à l'absolue liberté qui présiderait à la décision, a fortiori dans un moment de vulnérabilité : c'est une fiction. Méfions-nous du culte de la bien-portance, de la performance, de la productivité qui structure notre société. Nous sommes conditionnés par les rapports sociaux, les relations familiales, qui ne sont pas toujours magnifiques, le bain culturel dans lequel nous vivons et où l'on nous explique toute notre vie qu'on coûte trop cher à la sécurité sociale par nos conditions matérielles d'existence – même si de tout cela nous essayons de nous affranchir. Nous ne pouvons pas évacuer la question sociale, qui pèse plus encore au bout d'une vie.

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