Nous souhaitons attirer votre attention sur cinq points. Premièrement, nous ne comprenons pas que les droits des personnes malades et la notion d'accompagnement ne soient rattachés qu'au premier titre du projet de loi.
Deuxièmement, nous saluons la possibilité d'une administration de la substance létale par un tiers. Mais nous regrettons que la définition retenue ne prenne pas en compte les situations dans lesquelles la personne malade ne serait pas en mesure de procéder à cette auto-administration ou ne le souhaiterait pas pour différentes raisons. Ces aspects doivent relever d'une décision partagée avec le soignant qui accompagne cette personne.
Troisièmement, la condition du moyen terme nous semble le point le plus discutable du projet de loi. L'interprétation très restrictive de la terminologie « court terme » par la Haute Autorité de santé pour la sédation profonde et continue maintenue jusqu'au décès a privé de nombreux malades de ce droit, occasionnant des souffrances pour elles et pour leurs proches. Nous vous appelons à ne pas reproduire la même erreur aujourd'hui.
La notion de maladie grave et incurable, qui place la demande d'aide à mourir dans le cadre d'une pathologie engageant le pronostic vital, et celle de souffrance insupportable et réfractaire nous apparaissent centrales et suffisantes, comme dans d'autres législations. À situation de souffrance égale causée par une pathologie grave et incurable, nous attendons une réponse égale et non laissée à la seule appréciation du corps médical.
Quatrièmement, le délai de réflexion et de réalisation de trois mois, cette « date de péremption » au-delà de laquelle le médecin devra renouveler les démarches, ne correspond pas aux attentes des personnes, notamment celles atteintes de maladies neurodégénératives. Pourquoi ne pas prévoir pour ces pathologies un accès encadré par des directives anticipées spécifiques ? Nous craignons que le « moyen terme » ne soit finalement assimilé à ces trois mois.
Cinquièmement, nous voulons réinterroger la juste place des proches et des soignants dans ce projet de loi. La collégialité de la procédure d'évaluation de la demande ne doit pas se limiter au médecin et à quelques soignants ne connaissant pas la personne malade. Elle doit intégrer les professionnels qui l'accompagnent au plus près, dont les professionnels du médico-social, sans oublier – si le malade le souhaite – la personne de confiance ou les proches, qui peuvent témoigner de sa philosophie de vie et de ses motivations existentielles.
Ensuite, nous souhaitons que le soignant soit dans la même pièce que la personne, même s'il n'administre pas lui-même la substance. Nous nourrissons de grandes inquiétudes quant à la possibilité ouverte à un proche d'assister la personne malade dans le cas où elle n'aurait pas la capacité d'agir seule. Imagineriez-vous un proche débranchant le respirateur artificiel d'une personne en fin de vie, qui en aurait demandé l'arrêt, pendant que le réanimateur attendrait dans la pièce voisine ? Ce point est d'autant plus problématique que ce projet de loi ne contient aucune mesure visant à renforcer les droits, les aides et le soutien des proches aidants pendant l'accompagnement de la personne malade et après son décès.