Nous en venons à l'article scélérat de cette loi, qui vise tout simplement à tuer l'agriculture familiale au profit de l'agriculture capitaliste.
Après la seconde guerre mondiale, l'objectif constant des politiques publiques a été de s'appuyer sur des exploitations détenues par un ou deux agriculteurs d'une même famille, employant parfois un ou plusieurs salariés. Vous ouvrez une brèche énorme pour favoriser l'agriculture capitaliste, dans laquelle les facteurs de production ne seront plus possédés par l'exploitant agricole mais par d'autres acteurs, en l'occurrence financiers, n'appartenant pas au monde agricole.
Cette mesure délétère conduira à une perte de souveraineté du monde agricole en ce qui concerne le premier des facteurs de production, qui est bien évidemment la terre.
Je rappelle que, si le capital des GFAI peut être détenu par des sociétés d'investissement à capital variable (Sicav) ou des sociétés privées d'assurance, ces groupements peuvent surtout, et c'est nouveau, faire appel aux épargnants. Ces derniers détiendront des titres financiers, toucheront des dividendes et bénéficieront des mêmes avantages fiscaux que les GFA, ce qui constitue une concurrence déloyale.
La quasi-totalité des acteurs agricoles sont opposés aux GFAI, qu'il s'agisse de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, de la Coordination rurale, de la Confédération paysanne, des Safer ou du Mouvement de défense des exploitants familiaux.
Comment peut-on défendre un tel article dans un texte censé faciliter le renouvellement des générations agricoles ? Lorsque l'on soumet le sigle « GFAI » à un moteur de recherche, les deux premiers résultats sont les sites de France Valley Investissements, société de gestion de portefeuille qui se félicite de la création des GFAI, et celui de Boursier.com. Voilà quels sont les véritables bénéficiaires de la financiarisation du monde agricole !
Adopter cet article nous conduira directement au modèle britannique, dans lequel les grands investisseurs ont accaparé les terres – avec pour conséquence une explosion du prix du foncier qui pénalise toute l'agriculture. Le Royaume-Uni importe massivement des denrées alimentaires et moins de 1 % de sa population active travaille dans le secteur agricole : voilà ce vers quoi nous allons tout droit !