On ne peut pas demander des engagements sur quinze ou vingt ans chaque fois qu'on accorde des fonds publics. On le constate lorsqu'on soutient des artisans ou des entreprises : la réalité de la vie économique est telle que les aides accordées par la puissance publique ne sont pas toujours un gage de succès.
Une telle disposition conduirait en outre à rigidifier très fortement les systèmes : mécaniquement, un agriculteur se convertissant au bio cinq ans avant sa retraite ne s'engagerait pas pour cinq ans, mais pour dix ans.
Que se passerait-il si un repreneur indiquait ne pas vouloir respecter cette obligation ? Voudriez-vous qu'on empêche son installation ? Si une exploitation de quatre-vingt hectares était reprise par deux personnes distinctes, l'opération serait-elle annulée au prétexte qu'une des deux refuse le maintien des terres en bio ? Une telle logique pourrait se traduire par des phénomènes de déprise ou d'agrandissement : des exploitants déjà installés acquerront ces surfaces, non pas pour produire en agriculture biologique, mais pour qu'elles soient comptabilisées comme infrastructures agroécologiques. Cette mesure irait donc à l'encontre de notre objectif de souveraineté.
Qui plus est, votre amendement est problématique sur le plan juridique : il transfère une obligation d'une exploitation à une autre ; or c'est l'agriculteur qui s'engage, pas l'exploitation. En outre, vous imposez une contrainte au propriétaire, mais aussi au repreneur.
Je comprends votre intention et je la partage, mais le dispositif que vous proposez dévoie la transmission. Dans un système économique dynamique, dans lequel l'offre s'adapte à la demande de produits, il me semble dangereux d'interdire toute remise en cause du choix du bio. Pourquoi empêcher un jeune qui reprend une exploitation d'abandonner le système laitier pour une autre production ? Je mets vraiment en garde contre un tel amendement.