Initialement, j'avais pensé qu'il s'agissait d'une loi d'orientation, mais je pense désormais qu'il serait plus objectif de dire qu'il s'agit d'une loi sur la formation et l'installation. Ce serait la meilleure façon de ne pas nourrir de faux espoirs vis-à-vis des agriculteurs, notamment vis-à-vis des candidats à l'installation.
Vous l'avez dit, Monsieur le ministre : il s'agit de former et d'installer plus, c'est-à-dire d'endiguer la chute du nombre d'exploitations agricoles. Le rapporteur Pascal Lecamp a rappelé tout à l'heure que trente exploitations agricoles disparaissent chaque jour en France. On en compte désormais moins de quatre cent mille : voilà le défi que nous avons à relever.
Pour favoriser l'installation de nouveaux agriculteurs, qu'ils soient ou non issus du monde agricole, la question qu'il faut traiter en priorité, c'est le partage du foncier. Il va falloir que l'on apprenne à partager le foncier et je m'adresse, en disant cela, au président de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), que nous avons auditionné il y a quelques semaines. Il va falloir partager et travailler sur la régulation et la spéculation.
Je regrette que le texte ne détaille pas plus précisément les différentes fonctions que peut remplir l'agriculture en 2024 : à côté de sa fonction première, qui est de nourrir, elle peut aussi contribuer à produire de l'énergie, par exemple avec la filière bois-énergie ; elle a aussi une fonction de protection de l'environnement et de la biodiversité et, enfin, d'aménagement du territoire et de la ruralité. En voyant ce qui se passe en ce moment à Sciences-Po, dont les élèves ont vocation à devenir les futures élites du pays, je comprends mieux pourquoi une partie de la population se sent éloignée de ses élites… L'agriculture, le monde agricole et la ruralité, ce sont aussi des valeurs humaines et humanistes, dont nous devrions pouvoir parler dans un projet de loi d'orientation agricole.
Enfin, j'aimerais que l'on précise l'articulation entre ce projet de loi dit « d'orientation pour la souveraineté en matière agricole et le renouvellement des générations en agriculture » et la politique agricole commune de l'Union européenne, qui nécessite, quant à elle, une réorientation. J'aimerais aussi que l'on parle davantage de l'élevage et du rôle des prairies, qui sont des filtres à eau et des pièges à carbone et qui, par le pâturage, peuvent garantir l'autonomie protéique du pays. La question des prairies, c'est aussi celle de la qualité de la matière organique de nos sols.
Nous avons déposé des amendements sur ces différents sujets, que nous souhaitons voir abordés. Je ne sais pas encore si je voterai ce texte : cela dépendra en grande partie du sort qui aura été réservé à nos amendements.