La balance commerciale est certes un indicateur, mais elle inclut les vins et les spiritueux, les céréales et, en partie, le lait, ce qui explique qu'elle soit positive. Il y a quand même un secteur dans lequel la désagriculturation est manifeste : la baisse des effectifs de bovins se traduit par une dégradation de la balance commerciale. C'est d'ailleurs valable pour toutes les viandes, puisque la balance commerciale doit être déficitaire de près de 3 milliards d'euros, alors qu'elle est positive autour de 10 milliards d'euros au niveau européen, je crois.
On arrive à exporter grâce à la PAC. Si nous actualisions les chiffres d'affaires de la ferme France année après année, on constaterait que la PAC est revenue aux industries de l'agroalimentaire. C'est bien parce que les industriels ont bénéficié de ces aides, même à l'export – quand on n'exporte pas cher, on exporte en quelque sorte ces aides de la PAC –, qu'il y a un danger. La valeur de production ne se définit plus par rapport à la valeur de nos produits mais en partie par les aides de la PAC. Il ne s'agit que de moyennes. Nos jeunes, eux, font face à des coûts de production différents.
La part de l'agriculture dans le PIB est certes stable, mais à regarder les comptes de la nation, on voit que la ligne des stocks contribue à notre valeur ajoutée. Du fait de la prise de valeur de nos bovins et de nos céréales en stock, le résultat ne correspond pas à la réalité de la trésorerie des agriculteurs. Si nous obtenons de tels chiffres, en réalité, c'est parce que les agriculteurs prennent sur eux et qu'ils n'ont pas investi à la hauteur de ce qu'ils auraient dû pour entretenir leurs outils et faire ce qu'ont fait les industries de l'agroalimentaire.
Je pourrai vous faire suivre les résultats d'une étude que nous menons chaque année avec l' European Milk Board qui montre qu'en moyenne, sur les dix dernières années, l'investissement moyen chez les agriculteurs français tourne autour de 0 euro, quand il est en moyenne de 16 ou 17 euros les 1 000 litres, en Europe, et qu'il va jusqu'à 52 euros. L'effet investissement est nul dans nos exploitations. Il témoigne d'un vrai retard dans les investissements qui a été souligné dans des rapports de l'IDELE (Institut de l'élevage) et de l'INRAE (Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement). Une étude de 2010, de mémoire, disait ainsi qu'une vache laitière sur trois était à reloger.