Les sucriers ont été reçus par le Président de la République lors d'une rencontre avec les cinquante plus gros émetteurs de gaz à effet de serre. Ils disposent donc tout de même d'une feuille de route en matière de décarbonation.
Pour ce qui est d'une feuille de route en matière de production de sucre ou d'éthanol, ce que l'on voit, c'est qu'avec la fin du moteur thermique en 2035, la France, d'exportatrice d'éthanol, deviendra importatrice nette – on est encore en train de perdre cette souveraineté. La consommation de cette essence pourtant augmente très régulièrement ; pour le consommateur, le boîtier flexfuel au superéthanol E85 est un moyen de rouler moins cher et de façon décarbonée, même si ce n'est que partiellement ; mais nous restons dans l'incertitude. En particulier, des pressions très fortes sur la fiscalité pourraient avoir des conséquences immédiates sur notre production. Il n'y a pas de ligne politique claire qui nous assure de la stabilité de la fiscalité ou nous garantit des volumes jusqu'en 2035 et après – puisqu'il restera de l'éthanol et du thermique jusqu'en 2050.
Si on allait au bout du raisonnement, avec une vraie vision, il faudrait même inciter les sucriers à construire des usines d'éthanol issu de betteraves et de céréales. En même temps que cela permettrait d'assainir le marché européen du blé, totalement saturé – il est tombé à 150 euros la tonne pour des coûts de production de 220 euros ; on en trouve même à moins de 100 euros en Pologne –, ce serait l'occasion de définir une vraie stratégie de décarbonation à l'échelle européenne. C'est ce que font les États-Unis, qui convertissent une grande part de leurs cultures de maïs en éthanol. Même si la stratégie de la France est tournée vers le véhicule électrique, il y aura encore une demande pour l'éthanol au niveau mondial, et pendant longtemps. Comment allons-nous nous positionner ? À ce stade, nous n'avons pas de visibilité pour le savoir, et c'est pourquoi nous n'investissons plus.