Au sujet du libre-échange, il ne faut pas nous replier sur nous-mêmes, mais bien continuer de commercer comme nous l'avons toujours fait. En revanche, des mesures de protection doivent éviter que certaines filières à risque, souvent agricoles, ne fassent les frais de tels accords qui profitent à d'autres filières, souvent industrielles – les pays en voie de développement exportent davantage de produits agricoles que de machines-outils. Du reste, beaucoup d'importations se font hors accords de libre-échange, dans lesquels les clauses miroirs ne devraient jamais être oubliées, sous peine de voir affluer, à la place de ce que nous ne produirons plus, des produits importés échappant à nos normes de production.
Pour en revenir aux prix planchers, s'agissant des revenus agricoles, la question des prix, si importante soit-elle, n'est pas la seule composante à prendre en compte ; il faut aussi travailler sur les coûts de production. Prenez la crise du bio : entre 30 % et 40 % du lait bio est vendu en conventionnel parce que le consommateur n'a pas les moyens de se le payer. À ne travailler que sur le prix plancher sans nous soucier des coûts de production, nous risquerions de produire tellement cher que les produits importés, moins chers et donc privilégiés par les consommateurs et la grande distribution, prendraient la place des nôtres. Nous finirions par ne plus rien vendre du tout ! Il faut protéger l'agriculture et lui assurer des prix raisonnables, mais sans négliger nos coûts de production. Quand vous perdez, comme en bio, 20 % à 30 % de rendement faute de moyens de lutte contre certains ravageurs ou certaines maladies, vos coûts de production s'en ressentent.