Les travaux du PNRI sur les haies ont mis en évidence des effets positifs et négatifs. On voit que ce n'est pas la solution : on ne sait même pas expliquer certains phénomènes. J'ai vu ce matin que le Conseil d'État a retoqué beaucoup de dispositions de la loi de simplification, n'en laissant presque rien. Qui plus est, cette loi ne tient pas compte des lois Egalim, ni des surtranspositions dont vous parliez toute à l'heure, pourtant marquantes pour la France du végétal – l'arboriculture, la viticulture, les grandes cultures et les cultures spéciales. En tant qu'agriculteur je voudrais vous sensibiliser à la question de la haie, aujourd'hui sanctuarisée à vie : on ne peut même pas faire du un pour un et, demain, certains produits devront respecter une zone de non-traitement (ZNT) à dix, quinze, vingt ou trente mètres de distance de la haie, pour peu que celle-ci soit considérée comme un réservoir d'arthropodes. Si on veut faire planter des haies, il faut dire aux agriculteurs qu'il restera du bénéfice : allez-y, plantez, et puis si vous voulez la décaler, vous la décalez ! Sinon, nous ne serons pas volontaires. L'agriculteur n'a pas de réticence de principe à planter des haies, mais l'instabilité politique, sociale ou sociétale rend la chose risquée.
Concernant la cicadelle, les néonicotinoïdes, notamment en enrobage, ont aidé. Nous misons beaucoup sur la génétique, qui résoudra bien des problèmes mais rencontre aussi ses limites. Le maïs jouera aussi un rôle : si l'Alsace n'est pas autant concernée que l'Allemagne, elle le doit à cette céréale, adaptée à la rotation alsacienne. Les chercheurs allemands ont montré que la cicadelle se nourrit de la betterave, de la pomme de terre et des racines du blé, mais boude apparemment celles du maïs. En planter permettrait donc de couper son cycle, ce qui expliquerait qu'il n'y en ait pas encore en Alsace ou qu'elles n'y fassent pas encore de dégâts.
Quant au prix minimum, sous le régime des quotas, 420 euros la tonne, je sais ce que c'est ; le prix plancher, je ne sais pas. Sur ce point, on pourrait améliorer les lois Egalim, de manière à inclure à peu près 75 % des coûts de production dans le calcul des prix. Le monde agricole craint que le prix minimum ne devienne aussi le prix maximum : quand les marchés flambent, un prix plancher risque d'être considéré comme la quote-part de l'agriculteur, suffisant à le faire vivre. À qui va le bénéfice ? Ne serait-ce que pour pouvoir réinvestir, la question se pose. Dans beaucoup de filières, la répartition de la valeur pose problème : une fois que toutes les négociations ont été faites en amont, on laisse à l'agriculteur le peu qui reste. La véritable question est donc : comment organiser une véritable répartition au sein des filières françaises ?