Notre groupe déplore en premier lieu les modalités d'examen de cette proposition de loi. La ministre de l'époque avait donné un avis défavorable lors de l'examen du texte au Sénat. Aujourd'hui, vous souhaitez étendre sa portée ; ce manque de constance nous interroge. En procédant de la sorte, le Gouvernement nous expose à deux difficultés principales. D'abord, il s'exonère d'une étude d'impact solide sur sa vision de la réforme et ses conséquences. Ensuite, il nous contraint à un examen précipité. Nous ne pouvons accepter qu'une réforme aussi importante connaisse un tel aboutissement et que le Gouvernement décide, par voie d'amendement, que la holding laissera la place à une fusion dès 2026.
La question de l'audiovisuel, et notamment de l'audiovisuel public, est indissociable d'une réflexion globale sur l'avenir de nos médias. Les états généraux de l'information mènent un travail approfondi sur ces sujets. La commission d'enquête sur l'attribution des fréquences de la TNT s'y est également penchée pendant plusieurs mois. Il aurait été judicieux de mettre à profit ces travaux pour aboutir à une réforme d'ampleur sur l'avenir de nos médias, de notre presse et de notre audiovisuel, au service d'une démocratie fragilisée.
L'abandon du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique, en 2020, qui prévoyait déjà la création d'une holding, était dû non seulement à la crise sanitaire, mais aussi à une absence de consensus. Les conditions n'étaient pas réunies, à l'époque, pour qu'une telle réforme aboutisse, et elles le sont encore moins aujourd'hui face à la perspective d'une fusion. Nous ne voulons pas d'une entité unique qui a pour justification la rationalisation budgétaire. Comme l'indique le rapport du Sénat, « la création de la holding ne devrait au final engendrer qu'un coût limité. Elle constituera a contrario un outil précieux pour procéder à des mutualisations dans tous les domaines possibles […] ».
Il est à craindre que la holding soit une structure complexe et ajoute une strate supplémentaire dans le processus de décision, ce qui compliquerait la coopération au lieu de la faciliter. Nous ne voulons pas d'une holding comme première étape vers la fusion, comme le souhaite le Gouvernement. Cependant, si ce projet aboutissait, toutes les filiales devraient garder leur spécificité dans un objectif de pluralisme et d'indépendance. Or les dispositions relatives à la gouvernance de France Médias laissent très peu de marges de manœuvre aux sociétés filiales pour déterminer leur orientation stratégique. Le projet de fusion parachèvera l'atteinte portée au pluralisme.
Nous nous opposons aussi à l'intégration de France Médias Monde dans le champ de la réforme. Les missions de l'audiovisuel extérieur sont spécifiques et distinctes des problématiques des opérateurs de l'audiovisuel public. Nous défendons d'autant plus cette position qu'Arte et TV5 Monde demeureront des organes indépendants, pour des raisons totalement légitimes.
Enfin, le modèle de l'audiovisuel public est indissociable de la question du financement. C'est la raison pour laquelle nous nous étions opposés à la suppression de la redevance, car aucun financement alternatif n'était proposé. Son remplacement par une part de TVA n'était pas satisfaisant. Nous voulons un financement universel et progressif, qui assure l'indépendance de l'audiovisuel public ainsi que la transparence et la pérennité de ses ressources. Nous n'avons aucune garantie quant à la pérennité du financement et encore moins quant aux moyens conférés à la future entité à laquelle nous ne pourrons apporter notre soutien.