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Intervention de Sophie Taillé-Polian

Réunion du mardi 14 mai 2024 à 16h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSophie Taillé-Polian :

On marche sur la tête ! Le paysage médiatique français est en grande difficulté. On vient d'apprendre qu'un nouveau milliardaire veut investir dans le secteur des médias. M. Stérin, qui semblait penser, lors de l'affaire du Journal du dimanche (JDD), que le propriétaire d'un organe de presse écrite peut faire ce qu'il veut au sein de son entreprise, entre aujourd'hui en négociation exclusive pour le rachat de Marianne. Alors que nous devrions nous focaliser sur la question de la concentration dans les médias, qui est essentielle pour la démocratie, nous cassons ce qui marche. Car, oui, le service public de l'audiovisuel fonctionne. Quatre Français sur cinq, chaque semaine, regardent la télévision publique. La radio publique recueille un tiers des audiences. Malgré les coupes budgétaires de ces dix dernières années, notre service public de l'audiovisuel continue à jouer son rôle. Il est innovant. Il est une de nos richesses.

Or, dans ce deuxième temps du quinquennat, vous vous apprêtez à le plonger dans de graves difficultés et à mettre en cause son indépendance. L'indépendance des médias publics réside avant tout dans leur financement, que vous avez fragilisé. Vous nous faites un certain nombre de propositions en la matière. Peut-être en débattrons-nous ; j'attends de voir. Vous vous attaquez maintenant, de manière méthodique, au second pilier de l'indépendance, à savoir la gouvernance.

Il est urgent que chacune et chacun puisse accéder à une information, des contenus et des émissions culturelles de qualité. À cet égard, le texte que nous examinons aura deux graves conséquences. Premièrement, il entraînera un appauvrissement du service public. Ce qui fait sa richesse, actuellement, c'est sa diversité. Le Gouvernement se trompe s'il pense que l'homogénéisation numérique est le seul avenir des médias et que leur fusion est l'unique moyen de concurrencer les plateformes numériques américaines. Ce n'est pas le retour de l'ORTF qui nous permettra de concurrencer Netflix, dont le budget est 100 fois supérieur à tout ce que nous pourrions imaginer dans notre pays. Comme on a pu l'observer, les fusions se traduisent souvent par une mise en coupe réglée de la radio. Je n'ose penser au sort qui sera réservé aux orchestres et au chœur de Radio France. La fusion des rédactions aboutira, là encore, à un appauvrissement et à une atteinte au pluralisme. Ce dernier désigne non pas seulement la diversité des sensibilités politiques, mais bien davantage une diversité de rédactions, de points de vue, de choix d'angles, de contenus et de sujets.

Deuxièmement, le texte portera atteinte à l'indépendance de l'audiovisuel public. Lorsqu'on concentre le pouvoir sur l'ensemble des médias, on fragilise la direction de ces derniers. Il est beaucoup plus facile d'exercer une pression à partir d'un seul point d'entrée. Ce que vous avez accompli en matière de financement et ce que vous voulez faire dans le domaine de la gouvernance constitue une attaque en règle contre l'indépendance du service public de l'audiovisuel.

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