Si nous croyons dans la force de l'éducation et dans les vertus de la formation, nous savons aussi que le système éducatif ne peut pas tout. La tendance au déclin du nombre d'agriculteurs est intrinsèquement liée au déficit d'attractivité du métier, lui-même dû en grande partie à la rémunération insuffisante des paysans. Tant que cette question et celle de la transmission ne seront pas réglées, nous redoutons que les efforts visant à l'installation de nouveaux agriculteurs restent vains. Or ce projet de loi qui vise le renouvellement des générations ne propose pas de solutions pour les agriculteurs, qui peinent à vivre des fruits de leur travail. Bien que le Gouvernement planche sur la question, que deux missions d'information aient été créées et qu'un texte doive être présenté avant l'été, aucune piste n'est sur la table. Nul ne sait comment le Gouvernement entend instaurer les prix planchers annoncés. Le constat demeure le même concernant le foncier ou les produits phytosanitaires, sur lesquels les discussions ont été renvoyés à une date ultérieure, selon des modalités qui restent à définir.
Ce flou nous inquiète et préoccupe légitimement le monde agricole. Il nous empêche d'aborder sereinement les débats sur ce projet de loi. Nous le regrettons d'autant plus que le texte propose quelques mesures intéressantes en matière d'éducation et de formation. Ainsi du contrat territorial de consolidation ou de création de formation, qui vise à augmenter le nombre de jeunes formés par la voie initiale scolaire dans les établissements de l'enseignement agricole technique en se basant sur une analyse des besoins et sur une concertation entre l'État, la région et les représentants locaux des branches professionnelles. Cela va dans le bon sens, mais il reste des éléments à consolider. D'une part, il faut que l'État s'engage à pourvoir et à financer le cas échéant les emplois nécessaires ; d'autre part, il faudra veiller à ce que le maillage territorial soit maintenu, voire renforcé.
La nouvelle formation au niveau bac + 3 devra se faire au plus près du terrain. En tant que corapporteure d'un rapport sur l'enseignement privé à but lucratif, je tiens à vous alerter au sujet de l'intitulé du diplôme de premier cycle prévu à l'article 5. Avec ma collègue Estelle Folest, nous avions recommandé de limiter le recours du terme « bachelor » aux formations proposées par le secteur privé et, dans un souci de cohérence, de modifier l'intitulé du bachelor universitaire technique (BUT), diplôme national délivré par l'enseignement supérieur public. Notre rapport a montré que la nomenclature actuelle était particulièrement peu lisible pour les étudiants qui intègrent l'enseignement supérieur. Il n'est donc pas souhaitable qu'un « bachelor agro » soit délivré par les établissements d'enseignement public. Je proposerai de renommer ce diplôme « licence » – si ce terme n'est peut-être pas le plus adéquat, mon amendement vise à ouvrir les discussions.
Je souhaite que nous fassions de la transition agroécologique et de l'agriculture biologique des modules de base de l'éducation et de la formation agricoles. C'est un préalable nécessaire pour orienter les nouvelles générations vers des modèles de production plus durables. Je défendrai des amendements pour corriger ou renforcer certains volets du projet de loi afin de mieux armer ceux qui, demain, travailleront la terre.