Monsieur le président, vous avez rappelé ma singularité dans le dispositif des élus locaux. J'ai travaillé dans quatre cabinets ministériels, avec Pierre Joxe, François Léotard, Michèle Alliot-Marie et Hervé Morin. Je me suis présenté aux élections municipales en 2020, considérant que j'agissais là dans la continuité de mon engagement militaire, même si la proximité avec le monde politique est bien moins acceptée en France que dans les pays anglo-saxons, en dépit des progrès réalisés depuis une trentaine d'années.
La commune de Publier, située entre Thonon-les-Bains et Évian-les-Bains est peuplée de 8 000 habitants. Compte tenu de l'attractivité de ce territoire, la commune change peu à peu de physionomie, passant du statut de gros bourg à celui de petite ville. Nous sommes également distants de treize kilomètres de la Suisse, pays avec lequel nos relations disposent encore d'une marge de progrès intéressante. Un grand nombre de travailleurs frontaliers habitent ou plutôt logent dans notre commune, sans véritablement participer à la vie communale.
Notre municipalité est particulièrement attachée à la cause militaire : je suis général de corps d'armée ; mon premier adjoint référent défense est réserviste de l'arme du train et ma directrice générale des services a servi huit ans comme officier à la brigade des sapeurs-pompiers de Paris. Les expériences de notre trinôme nous permettent de partager la même sensibilité et la même implication, notamment en matière de défense civile.
Lors des premières années de notre mandat, nous avons dû assurer la gestion opérationnelle de la pandémie de la Covid, dans un contexte particulièrement anxiogène et face à une grande fragilité psychologique de nos concitoyens, résultat de nombreuses années de relâchement collectif de la conscience d'appartenir à une collectivité, un territoire, une nation. Aujourd'hui, il faut réinculquer l'esprit de défense et de nation à presque deux générations qui l'ont oublié. Il faut reprendre l'ensemble des fondamentaux qui n'existent plus aujourd'hui. Pour le dire un peu crûment, peut-être devrions-nous plutôt enseigner l'éducation civique que l'éducation sexuelle à l'école.
La population attend tout d'un maire. Pendant la pandémie, comme j'étais démuni pour faire respecter les contraintes sanitaires, ne disposant pas à l'époque de police municipale, j'ai décidé de recourir au concours de réservistes de la gendarmerie, en tant que contributeurs occasionnels du service public, dans le droit fil de la réserve de sécurité civile. Malheureusement, le contrôle de légalité s'y est opposé, prétextant que j'allais établir une milice.
Nous avons réactualisé notre plan communal de sauvegarde et je rappelle que les intercommunalités ne sont pas compétentes en la matière, étant des établissements publics et non des collectivités territoriales : le maire reste évidemment le responsable. Dans mon plan communal de sauvegarde, j'ai défini mon seuil de capacité : je sais que je peux gérer jusqu'à 300 personnes. Les analyses de risque sont bien établies, dans la mesure où les services de l'État produisent un bon travail dans ce domaine. Depuis le début de ma mandature, le seul risque auquel j'ai été confronté est le risque incendie. Par exemple, à la suite d'un incendie, il nous a fallu évacuer trente familles dans une résidence, un soir à 23 heures. De même, une usine d'embouteillage des eaux d'Évian est située sur ma commune et lors d'un incident, les capteurs se sont déclenchés lorsqu'ils ont perçu des risques de pollution. À cette occasion, je me suis aperçu que notre plan communal de sauvegarde n'avait pas intégré les plans des entreprises. Nous sommes actuellement en train d'y remédier.
Nous disposons d'un correspondant défense. Mais comme les militaires sont situés à une heure et demie de route de notre commune, il ne rencontre le délégué militaire départemental (DMD) qu'une seule fois dans l'année, à Annecy. Il me semble d'ailleurs nécessaire de redéfinir la mission du DMD, qui ne peut pas se contenter d'être le conseiller défense du préfet, mais devrait également être celui des collectivités territoriales. Le DMD doit donc être replacé au cœur du dispositif et lui redonner sa responsabilité.
La Haute-Savoie héberge le 27e bataillon de chasseurs alpins (BCA) et l'École militaire de haute montagne (EMHM), et ces deux unités sont employées, pour les opérations extérieures (Opex) ou l'opération Sentinelle par exemple. En conséquence, les militaires que je rencontre le plus souvent sont ceux du pays voisin, la Suisse, qui présentent l'avantage de bénéficier d'une stabilité importante dans leur poste. A contrario, en six ans, j'ai connu trois préfets et trois DMD. En l'espèce, ce renouvellement régulier n'est pas très productif, ni incitatif.
S'agissant de la relation entre les civils et les militaires, beaucoup reste à faire. Je relève cependant que les entreprises ont été sensibilisées à la sécurité et que certaines font partie d'un organisme de défense qui identifie les entreprises à risque. En revanche, en tant que maire, j'ignore si les deux principales entreprises de ma commune appartiennent à ce groupe. Je déplore donc un réel déficit de communication.