Elles le sont déjà ! Certains essaient de s'y soustraire en ayant recours à des centrales d'achats européennes, c'est vrai, et il existera toujours des batteries de juristes prêts à trouver le moyen de contourner la loi. C'est bien le sens des travaux d'Anne-Laure Babault et d'Alexis Izard à qui une mission parlementaire a été confiée pour améliorer le revenu des agriculteurs. On en revient toujours au même point : la rémunération est un critère déterminant de l'attractivité des métiers de l'agriculture, de l'installation et du renouvellement des générations.
J'en viens au texte en lui-même : l'article 1er prévoit que les politiques publiques concourent à assurer la souveraineté alimentaire de la France, en veillant à préserver et à améliorer le revenu des agriculteurs et des actifs agricoles. Le sujet du revenu est à nouveau cité plus loin. La rémunération n'est donc pas absente de cet article qui tend à fixer les grandes orientations.
La rémunération n'est jamais un combat gagné d'avance. Dans tous les pays d'Europe et au-delà, le même problème se pose. Nous devons poursuivre la bataille mais aussi mener, en parallèle, celle de l'opinion contre ceux qui pensent qu'en la matière, le juste prix serait le prix le plus bas. C'est d'ailleurs un point sur lequel nous pourrions être d'accord : faire en sorte qu'on ne nous casse plus les oreilles avec cette idée-là car, au bout du compte, ce ne sont plus les produits de nos agriculteurs qu'on achète et tout le monde paie les conséquences de ce nivellement par le bas : les agriculteurs dont les revenus baissent et les consommateurs qui achètent des produits de moins bonne qualité.
D'autre part, les lois Egalim contiennent plusieurs dispositions relatives à la restauration collective et nous continuons à y travailler pour que chacun prenne sa part : l'État, en faisant respecter les objectifs qu'il a fixés, mais aussi les collectivités, notamment en proposant des produits qui répondent aux exigences des circuits courts ou de proximité. C'est ainsi que nous soutiendrons les agriculteurs. La rémunération est donc bien au cœur de notre projet.
N'oublions pas, par ailleurs, que certaines filières ne sont pas soumises au dispositif de contractualisation et que, jusqu'au sein de celles qui y sont soumises, des acteurs résistent – je pense à la filière de la viande bovine. D'autres n'ont pas voulu en profiter. C'est leur choix mais on ne peut pas se plaindre qu'une loi ne soit pas appliquée si on n'a pas voulu s'y soumettre. C'est le cas de la filière des fruits et légumes ou de la filière viticole. On peut, bien sûr, comprendre leur logique économique mais on ne peut pas critiquer les causes du mal et refuser d'appliquer le remède. Vous devrez, à cet égard, réfléchir aux filières à qui il conviendrait, après les événements de ces trois dernières années, de proposer d'entrer dans Egalim.
Enfin, le secteur a subi, lui aussi, les conséquences d'une grave crise inflationniste. Dans les négociations, il a fallu le temps que se répercute dans la rémunération des agriculteurs l'augmentation des prix.
En tout cas, vous ne pouvez pas dire qu'on ne se soit pas saisi du sujet de la rémunération des agriculteurs. Simplement, nous ne sommes pas encore au bout du chemin. C'est aussi, je le répète, une bataille d'opinion. Tant que personne ne défendra l'idée qu'une alimentation de qualité a un coût qu'il faut accepter de payer, nous n'avancerons pas.