Le groupe Gauche démocrate et républicaine s'associe bien sûr aux propos d'Alexis Corbière, et adresse tout son soutien aux proches de la victime de cet accident de travail qui s'est produit dans notre enceinte.
Le budget 2021 devait être le budget de sortie de crise, à la suite d'une année 2020 marquée par la crise du covid. L'exécution confirme une croissance forte de 6,8 %, mais qui n'a pas permis de combler la chute énorme de 2020 – elle avait dépassé 8 %.
Certes, la responsabilité de cette situation ne vous incombe pas totalement. La prolongation de la crise sanitaire a affecté notre économie, comme toutes les autres partout dans le monde. Cela a aussi permis de révéler les contours d'un modèle plus respectueux des équilibres écologiques ; cette crise inédite, par sa brutalité et par son ampleur, aura été amortie par les aides massives mises en place sur lesquelles nous souhaitons débattre. Nous devons nous interroger sur le chemin à suivre.
Personne n'a nié l'impérieuse nécessité d'un plan d'urgence et d'un plan de relance pour faire face aux restrictions imposées par la crise sanitaire. Les soutiens accordés dans ce cadre – financement du chômage partiel, fonds de solidarité, baisses de cotisations compensées à la sécurité sociale – se montent à plus de 30 milliards d'euros. Ils ont permis au pays de tenir dans la tempête.
Cela devrait vous conduire à une réflexion sur l'ineptie des mesures que vous avez prises, ou que vous voulez prendre aujourd'hui. Comment pouvez-vous continuer à plaider pour punir les chômeurs, par le truchement d'un durcissement de leurs conditions d'indemnisation ? La sortie de la crise sanitaire aurait dû vous conduire à ouvrir le vrai chantier de la sécurité d'emploi et de formation tout au long de la vie. N'oublions pas que les chiffres du chômage sont aussi la résultante de ces règles nouvelles, alliant radiations et démissions. Vous continuez de faire la guerre aux chômeurs, nous préférons faire la guerre au chômage !
Dans la même veine, nous n'avons jamais contesté la nécessité d'accompagner et de soutenir les entreprises dans cette période si compliquée. Mais vous avez utilisé des aides trop générales et peu ciblées, et cette logique a été amplifiée en 2021. Aux dispositifs minimalistes du début de la crise se sont progressivement substitués des dispositifs plus généreux, mais aussi plus généraux, qui n'ont nullement intégré les exigences sociales et environnementales.
Était-ce trop demander que le fonds de solidarité – 26 milliards d'euros tout de même –soit assorti de règles comme le non-versement de dividendes, le maintien de l'emploi ou le respect des normes environnementales ? Manifestement, c'en était trop pour vous ; c'est pourtant le seul chemin viable pour un développement respectueux des femmes et des hommes comme de notre planète.
Au-delà de ces mesures d'urgence, nous contestons vos choix économiques. Je prendrai deux exemples significatifs.
Le premier concerne la mesure la plus coûteuse de votre plan de relance : la baisse de moitié de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) que vous souhaitez poursuivre en loi de finances pour 2023, comme cela a été confirmé par Mme la Première ministre. Par son aspect très général, la baisse de la CVAE, couplée avec la diminution de la cotisation foncière des entreprises (CFE), a essentiellement profité aux grandes entreprises et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI) : sur 11 milliards d'euros, plus de 60 % ont profité à ces dernières et 20 % à 281 grandes entreprises. En outre, vous brisez le lien entre impôt économique et territoire, au risque d'envoyer le signe que se battre pour l'implantation d'entreprises et d'emplois ne serait plus un moyen d'offrir des services publics à la population.
Le vote qui a eu lieu en commission des finances ce matin, exigeant la compensation intégrale aux collectivités territoriales du coût de l'augmentation du point d'indice des fonctionnaires, au demeurant fort légitime, n'est pas anodin. C'est l'expression d'une exigence qui monte : les collectivités territoriales doivent être mieux respectées, et cesser d'être considérées comme les supplétives d'un État qui veut tout recentraliser.
L'autre choix économique et politique qui s'affirme, et sur lequel les premières discussions montrent votre inexorabilité, c'est le refus de s'attaquer aux superprofits et aux superpatrimoines de ceux qui ont profité de la crise.
Quelques chiffres suffisent à éclairer notre propos. De mars 2020 à octobre 2021, les richesses des grandes fortunes françaises ont bondi de 86 %, soit de 236 milliards d'euros. Par surcroît, cela a entraîné une accumulation d'épargne astronomique de 175 milliards d'euros.
Ainsi, alors que le Gouvernement et les groupes parlementaires qui le soutiennent n'ont que le terme « solidarité » à la bouche, nous proposons une nouvelle répartition des richesses à même d'assurer une hausse des salaires, des pensions et des allocations, à l'opposé de la logique de chèques qui, de facto, conduira à la division entre nos concitoyens.
Pour toutes ces raisons, nous étant opposés aux lois de finances pour 2021, il est bien naturel que nous émettions un vote cohérent à l'occasion de ce projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes.