Chacun doit mesurer ce que signifiera pour la Nouvelle-Calédonie le vote que nous nous apprêtons à tenir. Comme l'a rappelé M. Delaporte, depuis les accords de Matignon en 1988 et de Nouméa en 1998, l'État a joué un rôle précis : celui du garant d'une méthode fondée sur l'équilibre, la recherche du consensus et la paix civile. Cette méthode a continûment fait ses preuves et la population calédonienne a pu, grâce à des accords consensuels, avancer vers un statut adapté à son territoire et à son histoire.
Si toutes les parties sont d'accord pour faire évoluer le corps électoral de la Nouvelle-Calédonie, force est de constater que la proposition qui nous est soumise aujourd'hui n'est pas une proposition de consensus. Ce qui manque pour aboutir au consensus, c'est du temps. Le Président de la République lui-même, en annonçant le report de la réunion du Congrès, ne dit pas autre chose. Nous avons besoin de temps pour organiser des négociations. Oui, elles ont déjà commencé et durent depuis des années, mais tel est le prix d'une solution pacifique pour la Nouvelle-Calédonie.
Au fond, si le temps que nous vous demandons par cette motion de rejet préalable est le prix de la paix, il n'est pas cher payé : nous voyons déjà les tensions se faire jour. Nous demandons la paix civile, le respect du droit de manifestation et condamnons les excès de force à chaque fois qu'ils surviennent. Par cette motion de rejet, nous demandons non la rupture des négociations, mais leur poursuite, leur reprise par l'envoi d'une mission du dialogue. Nous demandons que le Premier ministre se ressaisisse du sujet, comme l'ont toujours fait ses prédécesseurs au cours de l'histoire.
La neutralité de l'État est la condition du consensus, de la paix civile et de l'émergence d'une solution acceptée par tous les acteurs de la démocratie néo-calédonienne. Voilà pourquoi nous appelons au vote de cette motion de rejet !