D'abord, je voudrais rappeler que la loi de 1905 intervient dans une France où la majorité de la population – y compris les instituteurs ! – va à la messe. Les instituteurs, laïques, pouvaient d'ailleurs être menacés par les curés à cette occasion. La loi de 1905 n'est pas une loi antireligieuse, mais areligieuse, qui sépare les Églises et l'État.
Une deuxième chose à préciser, souvent ignorée, est que le législateur a souhaité, après débat – qui a eu lieu surtout au Sénat –, que la loi s'applique en Algérie. Il s'agit donc d'une loi à portée universelle, qui n'était pas réservée aux religions de la France métropolitaine. Alors que le code de l'indigénat organisait la discrimination pénale des musulmans d'Algérie, la loi de 1905 comportait une dimension universelle.
Troisième chose, en instituant la neutralité de l'État et de la fonction publique, la loi de 1905 institue des espaces distincts. L'État est neutre ; chez vous, vous pouvez organiser les cérémonies que vous souhaitez ; dans un lieu de culte, il est possible, dans le respect des lois de la République, de faire des signes ou des prières conformes à la religion qui occupe ce lieu. Voilà déjà trois espaces. Enfin, il y a le reste, c'est-à-dire l'espace public, qui accueille une diversité de situations, gérée en fonction des cas soumis au juge. Dans un État de droit, c'est le juge qui rendra les arbitrages lorsque des tensions surviennent, sur ce qu'il convient de faire ou non dans ces différents espaces.