À la suite des travaux de la Convention citoyenne, la commission éthique et société de la Fédération protestante de France a produit un texte sur l'aide à mourir et la fin de vie, qui vous a été remis le 4 avril dernier. Sa première recommandation, qui fait l'unanimité, est un plaidoyer pour les soins palliatifs. La deuxième affirme la nécessité d'humaniser la fin de vie. Troisièmement, nous considérons inopportun de changer le cadre législatif actuel ; il convient de donner les moyens nécessaires à l'application effective de la loi de 2016, qui demeure insuffisamment connue. Enfin, nous plaidons pour une loi programmatique d'accompagnement du grand âge et de la fin de vie.
Aucune loi ne pourra jamais répondre à la multiplicité des situations de fin de vie, leur complexité, les vécus très différents et les attentes spécifiques des personnes. Nous sommes relativement inquiets des effets collatéraux d'une telle loi. Finalement, ce qui est revendiqué comme un droit pour les uns ne devient-il pas un devoir de partir pour d'autres, ne serait-ce que moralement ?
Nous demandons une loi de programmation décennale pour le développement d'une culture de soins palliatifs en France. Ensuite, le projet de loi en discussion propose de modifier le code de la santé publique : la formulation « toute personne malade dont l'état le requiert a droit à accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement » serait remplacée par une rédaction qui évacue la dimension spirituelle de l'accompagnement, laquelle doit à notre sens apparaître dans la loi. Troisièmement, l'aide active à mourir peut se matérialiser par l'assistance au suicide ou par l'euthanasie, qui consiste en l'administration par un tiers d'un produit létal. C'est transgresser le serment d'Hippocrate qui indique explicitement « Je ne provoquerai pas la mort de mon patient ». Il existe certes une clause de conscience mais, dans le cadre de la loi, elle risque de déchirer les équipes soignantes et les établissements.
Je souhaite conclure en soulevant une série de questions qui pourraient donner lieu à des amendements. Tout d'abord, la notion de maison d'accompagnement mérite d'être précisée. Ensuite, s'agissant des critères d'éligibilité à l'aide à mourir, nous considérons très flou le concept de pronostic vital engagé à court ou moyen terme figurant à l'article 6. Ce même flou entoure le caractère réfractaire d'une souffrance physique et psychologique, qui mérite là aussi d'être précisé. Par ailleurs, dans le cas où une personne choisit de ne plus recevoir les traitements et où les souffrances sont insupportables, la loi Claeys-Leonetti permet déjà d'accéder à une sédation profonde, continue et irréversible.
Nous estimons que le projet de loi s'abstient à tort d'exiger le caractère constant de la demande du patient. Celle-ci devrait être accompagnée avant d'être instruite. Nous sommes surpris que la procédure puisse intervenir sans que les proches et la personne de confiance ne soient informés et nous regrettons que la collégialité de la décision médicale ait été éliminée du projet de loi. Je m'interroge sur la disposition prévoyant que le médecin, au bout de trois mois, évalue à nouveau le caractère libre et éclairé de la volonté du patient. Enfin, le docteur Hentz m'a suggéré de recommander la présence obligatoire d'un médecin en cas d'ingestion d'un produit létal, afin de faire face à toute complication.