La communauté bouddhiste exprime ses préoccupations quant au projet de loi sur la fin de vie. Avec mes homologues des autres cultes, nous avons eu l'opportunité de contribuer au débat à travers l'ouvrage collectif Religions et fin de vie, qui offre une perspective éclairante sur les enjeux éthiques et spirituels entourant ce sujet délicat. Les bouddhistes considèrent la vie précieuse et sacrée ; nous valorisons la compassion envers tous les êtres vivants, y compris nous-mêmes. C'est pourquoi nous sommes à tout le moins réticents à soutenir toute légalisation de l'euthanasie et du suicide assisté. Notre tradition enseigne que chaque moment de la vie constitue une opportunité d'apprentissage et de croissance spirituelle, même dans les moments de souffrance et de difficulté.
La perspective bouddhiste encourage à trouver la paix et le sens dans toutes les expériences, y compris la fin de vie, plutôt que d'opter pour une mort médicalisée prématurée. Selon nous, vouloir remédier à la souffrance en mettant fin à la vie revient à se tromper de combat et à semer de nouvelles causes de souffrance. Plutôt que de contribuer à regarder la mort en face, à l'apprivoiser, cette démarche nous détourne de l'essentiel : intégrer pleinement la mort dans la vie.
À nos yeux, la loi du 2 février 2016 est satisfaisante et bien adaptée. Encore faudrait-il qu'elle soit vraiment appliquée partout car elle demeure méconnue ! Dans un pays sécularisé comme le nôtre, nous comprenons que les croyances religieuses n'ont pas à s'immiscer dans la législation. Cependant, nous souhaitons souligner que de nombreux citoyens, même ceux qui ne sont pas religieux, sont troublés par ce projet de loi.
Aussi recommandons-nous un renforcement des soins palliatifs accessibles à tous afin d'offrir une alternative véritablement humaine à la mort médicalisée, en investissant dans la formation des professionnels de la santé et en améliorant les ressources disponibles pour accompagner les patients en fin de vie. Nous craignons les conséquences d'une législation qui pourrait fragiliser les liens familiaux et communautaires, en encourageant une vision individualiste de la fin de vie. L'absence de garde-fous adéquats pourrait potentiellement conduire à des abus, à des pressions indues sur les personnes vulnérables et à une détérioration du tissu social.
En conclusion, nous vous exhortons à considérer attentivement les implications morales et éthiques de ce projet de loi. Puissions-nous trouver des solutions qui respectent la dignité humaine, préserver la vie dans toute sa fragilité et offrir un soutien compassionnel aux personnes en fin de vie comme à leurs proches. Le Conseil d'État a souligné l'importance de légiférer avec prudence et réflexion dans ce domaine délicat. Dans la droite ligne des propos du doyen Jean Carbonnier, nous estimons préférable de favoriser des solutions qui laissent plus de place aux mœurs et à l'éthique, – j'oserais dire : au bon sens ! – plutôt que d'imposer des règles rigides et légales. Il en va, selon nous, de la vitalité de notre société.