Je suis producteur de plants de betterave. Il existe effectivement des variétés résistantes à la jaunisse : on en trouve déjà sur le marché cette année. C'est bien la preuve qu'avec la recherche, à un moment donné, on peut trouver, mais il faut y consacrer des moyens. La profession en a mis, l'État aussi, un travail a été fait. Nous allons trouver des solutions. Des tomates qui résistent quinze jours ou trois semaines à maturité dans les champs – on ne peut pas récolter quand il y a, par exemple, des orages – ont également un intérêt, de même que des variétés résistantes aux pucerons et à certaines maladies.
J'en viens à la question de l'eau, que je connais un peu. Il tombe 330 milliards de mètres cubes d'eau sur la France et nous en consommons 3 milliards de litres pour l'irrigation agricole, soit 1 % de l'eau qui tombe. On dit que l'agriculture consomme 58 %, car les autres usages ne sont pas considérés comme de la consommation. Mes chiffres dérangent, mais regardez-les bien.
Imaginons qu'une bouteille d'un litre représente les précipitations annuelles : nous sommes capables de stocker, Voies navigables de France comprises, l'équivalent d'un petit gobelet dans lequel on boit son café, c'est-à-dire 5 centilitres, et ce que nous consommons pour l'irrigation tient dans un dé à coudre. Il faut se fixer l'ambition de stocker davantage et d'avoir ainsi à notre disposition au moins trois dés à coudre. Quand la bouteille est pleine, ils ne se voient pas, mais si on attend qu'elle soit vide, au mois de juillet, cela pose un problème. Prendre de l'eau pour la mettre dans un réservoir ne présente pas de difficulté en ce moment – il y a des endroits où on a trop d'eau. Nous avons la chance d'être un pays qui en reçoit beaucoup par rapport à d'autres, qu'ils soient européens ou méditerranéens. Plus au sud, les précipitations ne sont pas les mêmes que chez nous, mais l'Espagne est capable d'en stocker 50 %, contre 5 % en France. Il faudrait donc mener, en matière d'eau, une véritable politique d'aménagement, structurante et multi-usages, au-delà de l'agriculture.
S'agissant du bio, nous sommes allés jusqu'à 22 % de la production dans la filière tomate d'industrie il y a quelques années – pour le reste, le marché était difficile. Cela fait trois ans que les chiffres sont en baisse – ils sont passés à moins de 10 % cette année. On a du stock en bio et pas assez en conventionnel – mais il est vrai qu'il s'agit d'un produit très standard.
Oui, il faut du bio mais, comme l'a dit M. Grandin, il faut ajuster. On ne doit pas pousser les gens vers un système. J'ajoute que les IFT, les indices de fréquence de traitement, sont plus élevés en bio qu'en conventionnel. Quand on utilise vingt kilos de soufre et qu'il pleut, il faut en remettre vingt kilos, alors que si on se sert d'un produit de synthèse, on peut appliquer 300 grammes sans avoir à recommencer dans les vingt et un jours suivants.