Les coûts de main-d'œuvre sont plus élevés en France que dans les pays voisins. Cela vient de notre modèle social, que nous défendons, mais qui est coûteux, bien que le dispositif TODE corrige la trajectoire.
Il est possible, dans le cadre d'accords, de clarifier certains points – des clauses miroirs concernant les résidus de pesticides, la protection de nos frontières à certains moments. Dans le marché unique européen, nous sommes grands exportateurs ; cela concerne moins la filière des fruits et légumes frais, si l'on excepte la pomme, mais c'est le cas pour les céréales, le vin ou l'alcool. L'espace unique européen est une bonne chose. Mais, à l'origine de la création de ce marché, l'agriculture n'était pas dans le champ de la concurrence. Peut-être serait-il encore possible que les organisations de producteurs se parlent entre elles dans le contexte de concentration de la grande distribution – nous ne sommes pas opposés à cette concentration, mais face à des opérateurs qui représentent 70 % du marché et alors que 56 % passe par les centrales, il pourrait être intéressant, y compris pour les distributeurs, que leurs interlocuteurs se coordonnent.
Initialement, l'idée était de faire entrer dans l'Union européenne des pays dont on savait qu'ils n'étaient pas alignés socialement et fiscalement sur nous, mais dont on escomptait qu'ils nous rattraperaient avec le temps. En réalité, beaucoup de pays, notamment parmi les derniers entrants, ont tout fait pour que cela n'arrive pas, ce qui leur donne un avantage compétitif objectif dans tous les domaines qui utilisent beaucoup de main-d'œuvre. La stratégie n'a donc pas fonctionné et cette histoire représente une sorte de vice originel.
Plutôt que d'y répondre par des systèmes de prix planchers, qui sont mal adaptés, du moins à notre filière doublement météo-sensible – en production et en consommation –, donc soumise à de forts aléas, et puisque l'Europe a souhaité favoriser les opérateurs organisés dans le cadre des programmes opérationnels, il faudrait aller au bout de cette logique en les autorisant à se coordonner pour rendre les prix et les volumes mis sur le marché cohérents et concordants avec un marché fluctuant.
Cette solution serait préférable à une réduction des échanges, du moins à l'intérieur de l'Europe. Au niveau extra-européen, la filière agricole estime que, trop souvent, la matière agricole a servi de monnaie d'échange lors d'accords internationaux qui ont favorisé l'industrie. Quelquefois, cela a permis de limiter des flux et de stabiliser des populations, comme dans l'accord avec le Maroc, mais, de manière générale, cela a créé d'importantes distorsions. Dans nos relations avec ces pays, il faut trouver le juste équilibre entre stabilisation d'une population et ouverture à l'échange compte tenu de notre capacité à produire suffisamment sur notre territoire.