S'agissant de la question relative aux légumes, les surfaces cultivées en céréales et en légumes sont totalement disproportionnées : 230 000 hectares de légumes versus 5 millions d'hectares de blé dur. Si le sujet consiste à constater que la France importe beaucoup de légumes, c'est vrai. Ce constat est-il lié à la culture des céréales ? Non, absolument pas.
J'ai été producteur de légumes et je sais de quoi je parle. C'est un travail extrêmement difficile, et qu'on doit fournir quelles que soient les conditions climatiques. Il ne s'agit donc pas d'une question d'arbitrage entre les légumes et les céréales. Si le journaliste veut nous faire dire qu'il est facile de cultiver des céréales, je le confirme parce que la mécanisation nous a aidés. D'ailleurs, la mécanisation se développe dans la culture des légumes. À titre d'exemple, l'Espagne cultive des asperges parce que la terre est très sableuse, très régulée à la même hauteur et il est possible de faire une production de masse avec du matériel. Toutefois, cette production de masse est essentiellement destinée à la conserve. En France, nous produisons un travail d'excellence qui nécessite une main-d'œuvre difficile à trouver parce que ce travail est pénible.
S'agissant de l'exportation, est-ce qu'on se pose des questions sur l'exportation des avions, du vin, de la belle restauration, etc. ? Est-ce que ce serait un péché d'exporter des céréales vers des clients qui en ont besoin ? Nous exportons dans les pays du Maghreb. Au Maroc, pas une goutte d'eau n'est tombée en hiver depuis trois ans. Au mois de février ou mars, les agriculteurs récoltent une tonne et demie de blé au lieu de quatre tonnes. Dès lors, je pense qu'il est de notre devoir de vendre à des meuniers des céréales que leur pays ne peut pas produire. Que l'on se rassure, nous ne vendons pas de céréales à des pays qui n'en ont pas besoin ; nous vendons des céréales à des pays qui en ont besoin, à savoir en Chine, pour pallier des problèmes de population, au Maghreb et un peu au Moyen-Orient pour pallier des problèmes de climat, etc.
Nous pourrions évoquer l'Afrique de l'Ouest, où il y a de l'eau et des terres. L'Afrique de l'Ouest est confrontée à un véritable sujet d'organisation. La France et l'Union européenne devraient construire avec l'Afrique de l'Ouest un plan de co-développement gagnant-gagnant de l'agriculture et de l'alimentation.
S'agissant de l'exportation de l'eau, j'entends le message. En effet, indirectement, nous exportons de l'eau, mais pour des pays qui en ont besoin. Quand on exporte des fleurs, indirectement, on exporte de l'eau.
Je pense qu'il n'y a pas de débat à avoir à ce sujet, car l'exportation me paraît tout à fait saine et normale pour nos agriculteurs, que ce soit pour les céréaliers ou pour d'autres producteurs. Nous sommes dans un monde ouvert. Nous devons travailler sur des règles équitables. Nous devons être acteurs de la transition. C'est extrêmement important pour nos enfants.