Je vous remercie de nous recevoir. La filière de la pisciculture française est représentée par une interprofession composée de trois collèges : le collège des pisciculteurs, le collège de transformateurs et le collège des fabricants d'aliments.
La pisciculture est probablement la filière agricole la plus déficitaire en France en termes de balance commerciale, l'essentiel des produits consommés dans notre pays étant importé. L'audition de ce jour nous fournit l'occasion de mettre en lumière cette filière et d'évoquer ce que vous pourriez faire pour faciliter son développement. Il y a deux ans, nous avons signé avec les deux ministères qui exercent une cotutelle sur nos activités, le ministère de la transition écologique et celui de l'agriculture, mais aussi Régions de France, le plan « Aquaculture d'avenir ». Ce plan chiffrait un certain nombre d'objectifs de développement de nos métiers. Nous avions essayé d'y proposer des objectifs raisonnables mais deux ans après sa signature, je ne vous cache pas mon inquiétude car la situation n'a guère évolué depuis cette époque.
Nous sommes très régulièrement en contact avec les autorités qui nous pilotent et cette audition pourrait nous permettre d'évoquer les freins et difficultés auxquels nous sommes confrontés. J'indique par ailleurs que le Haut-Commissariat au plan a produit récemment un travail, très riche, sur la pisciculture et a formulé un certain nombre de conclusions.
Certains estiment qu'un choix européen a été fait en faveur d'un développement de la pisciculture dans d'autres pays plutôt que dans le nôtre, au prétexte que « cela ne fonctionnerait pas » en France. Je m'inscris en faux : contrairement à une idée reçue, la pisciculture française est rentable et les produits que nous commercialisation sont demandés par les consommateurs, comme toutes les enquêtes le prouvent.
Pourtant, depuis vingt-cinq ans, aucune pisciculture n'a été créée en France. Si vous interrogez des pisciculteurs sur les difficultés auxquelles ils sont confrontés, 99 % d'entre eux vous répondront qu'ils sont la proie d'un carcan administratif absolument insoutenable. Aujourd'hui, leur principal souci ne consiste pas à savoir s'ils pourront se développer, mais plutôt s'ils vont pouvoir continuer à exister. En effet, nos métiers sont soumis à des obligations concernant le renouvellement des autorisations de la plupart des installations de pisciculture, qui sont classées. Or aujourd'hui, lors des renouvellements, nous sommes systématiquement confrontés à des délais de traitement immenses et des demandes d'études très onéreuses. Il y a cinq ans, il fallait entre deux ans et trois ans pour obtenir le renouvellement d'une autorisation, qui engageait en outre entre 15 000 et 20 000 euros d'études. Aujourd'hui, pour un chantier à peu près identique, il faut plus de cinq ans et le budget consacré aux études demandées par l'administration est pratiquement illimité.
Dès lors, il s'agit de savoir où nous allons et comment fixer un cadre pour que nos demandes obtiennent des réponses de l'administration en temps voulu, et non plus attendre trois à cinq ans. Le processus est devenu totalement itératif, nous n'en voyons jamais la fin.
Je souhaite également porter à votre connaissance un autre élément, qui est vraiment un cas d'école : depuis plus de six ans, nous essayons de mettre en place un arrêté avec l'administration. Nous vous transmettrons les documents relatifs à ce projet, qui n'a pas encore abouti, malheureusement.
Enfin, si les préfets prennent les décisions qui nous concernent, ils sont également conseillés par un ensemble d'organismes, dont l'Office français de la biodiversité, qui ne nous est pas particulièrement favorable. À titre d'exemple, sur vingt-cinq ou trente dossiers qui sont présentés au préfet d'un département de l'est de la France, cet organisme n'émet quasiment que des avis négatifs.