Après la fin du monopole d'EDF sur les réacteurs nucléaires de production d'électricité, voici la fin de l'IRSN, cet outil de l'État qui a fait ses preuves et dont tous regretteront la liquidation, car grâce à lui, la France était une référence internationale en la matière, notamment sur le plan scientifique. Voici surtout – c'est un point d'une importance capitale pour notre souveraineté – la fin de l'approche intégrée des enjeux de sûreté et de sécurité, une décision qu'André-Claude Lacoste, ancien président de l'ASN, qualifie de faute majeure.
Malgré le contexte géopolitique actuel et malgré la menace terroriste pesant sur la sécurité intérieure, vous choisissez, par le démantèlement de l'IRSN, de mettre fin à la conception commune de la sûreté et de la sécurité ainsi qu'à l'expertise commune en matière de nucléaire civil et militaire et de non-prolifération. On se demande comment il est possible de traiter avec une telle légèreté des intérêts si fondamentaux de la nation, alors même que plusieurs gouvernements ont autrefois écarté cette réforme pour des raisons de sécurité nationale.
Ce projet de loi fait de la sécurité une variable d'ajustement : après tout, on n'a qu'à mettre la sécurité des installations nucléaires civiles sous la houlette du ministère des armées, dont elle ne relève pas ! Et on n'a qu'à mettre là, dans une filiale du CEA, la dosimétrie essentielle en cas de crise nucléaire !
La France ne peut engager sa sécurité et sa sûreté nucléaire sur une pente aussi périlleuse. Cette mauvaise réforme est typique d'un pouvoir faible, qui manque d'une qualité essentielle qu'on appelle le sens de l'État.