Nos débats ont confirmé le caractère trompeur de ce texte, qui tend à réorganiser les structures plutôt que d'améliorer notre sûreté nucléaire. La distinction spécifiquement française entre l'organe de contrôle – l'AAI – et l'organe de sécurité – l'établissement public industriel et commercial (Epic) – représente un modèle éprouvé et efficace en matière de sûreté nucléaire. Ce système permet de confronter les doutes et fonctionne très bien.
La fusion des deux entités signe la fuite inéluctable des compétences – cela a déjà été déploré. Rappelons l'avis des institutions qui font autorité en la matière. L'Anccli suit le HCTISN, qui « se demande […] si, au-delà de l'exposé des motifs, les dispositions du projet de loi sont à la hauteur des ambitions affichées par le Gouvernement. Certains points risquent en effet d'être en retrait par rapport au droit en vigueur. » Le Conseil national de la transition écologique (CNTE) souligne lui aussi que « certains membres s'interrogent sur l'opportunité et la temporalité de la réforme » et s'inquiète unanimement du « risque d'instabilité » qu'elle introduit. Il a également relevé, parmi les points faibles du texte – toujours présents après la CMP –, les multiples renvois au règlement intérieur de la future autorité.
Le groupe GDR – NUPES s'opposera à l'absorption de l'IRSN par l'ASN en votant la motion de rejet préalable. Il le fera pour trois principales raisons. D'abord, c'est une fusion injustifiée : l'organisation actuelle est efficace et la réforme viendrait bousculer une organisation fonctionnelle, que l'ensemble des acteurs souhaitent préserver. En outre, le risque de fissuration de notre système de sûreté nucléaire est réel avec cette charge de travail inédite. Enfin, nous ne sommes pas dupes : la réforme vise surtout à favoriser le business nucléaire et l'arrivée de nouveaux acteurs, dont ceux des SMR – le rapport du Sénat l'explique très clairement. Autant de raisons, chers collègues, de voter cette motion.