Intervention de Nicole Le Peih

Séance en hémicycle du lundi 8 avril 2024 à 16h00
Adaptation du droit de la responsabilité civile — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicole Le Peih, rapporteure de la commission mixte paritaire :

Quatre mois seulement après la première lecture, dans cette assemblée, de la proposition de loi visant à adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels, nous voici réunis pour voter le texte adopté par la commission mixte paritaire (CMP). Ce calendrier, dont je me félicite, illustre la volonté du Parlement d'avancer rapidement sur le sujet des troubles anormaux de voisinage, qui constitue une préoccupation du quotidien pour nos concitoyens.

Le texte adopté par l'Assemblée nationale définissait un cadre clair au sein du code civil : il codifiait la jurisprudence de la Cour de cassation s'agissant de la responsabilité sans faute pour trouble anormal de voisinage et reprenait l'exception à ce principe intégrée au code de la construction et de l'habitation. Cette exception prévoit que la responsabilité civile pour trouble anormal de voisinage peut être écartée lorsque trois critères sont réunis : l'antériorité de l'activité à l'origine du trouble, le respect de la législation en vigueur et surtout la poursuite de l'activité dans les mêmes conditions. Notre objectif était de rendre le droit plus lisible afin qu'il soit encore plus accessible à nos concitoyens.

Le texte a été enrichi au Sénat. Au-delà de modifications rédactionnelles, la Chambre haute a souhaité aller plus loin en introduisant au sein du code rural et de la pêche maritime un régime spécifique pour les activités agricoles.

Consciente des enjeux particuliers relatifs aux exploitations agricoles, j'ai travaillé avec la sénatrice Françoise Gatel pour conserver un régime spécial qui n'empiète pas sur le droit au recours des voisins susceptibles de subir un trouble anormal. Je tiens à saluer les échanges constructifs que nous avons eus avec la rapporteure du texte au Sénat. Nous avons travaillé de concert pour vous proposer un dispositif qui n'entrave pas la liberté d'entreprendre tout en préservant le droit au recours.

Ainsi, le présent texte prévoit que l'exonération s'applique dès lors que les activités agricoles à l'origine du trouble anormal n'ont subi aucune modification substantielle. Cette rédaction avait été suggérée par le Conseil d'État en 2019. La même logique s'applique lorsque les modifications des conditions d'exercice sont liées à une mise aux normes, afin de ne pas pénaliser un exploitant qui se conforme simplement à la législation ou à la réglementation en vigueur. Ce n'est donc pas un blanc-seing à l'ensemble des troubles de voisinage, mais un dispositif de bon sens, que nous vous proposons.

Nous avons conscience que la proposition de loi ne réglera pas les besoins des exploitants agricoles du jour au lendemain. Tout comme le projet de loi d'orientation pour la souveraineté en matière agricole et le renouvellement des générations en agriculture que nous examinerons bientôt, elle fait néanmoins partie des solutions concrètes que nous mettons en œuvre pour y répondre. Avec cette proposition de loi, nous voulons être à l'écoute de tous nos territoires. Ce texte doit apporter de la visibilité à nos concitoyens en codifiant une jurisprudence, et en inscrivant dans le code civil à la fois le principe et son exception.

Je remercie le garde des sceaux pour son engagement sans faille en faveur du texte, engagement qui s'est concrétisé lors de sa visite dans le Morbihan, au cours de laquelle il a été à l'écoute des demandes de nos concitoyens en faveur d'un bien vivre-ensemble. Je salue également Caroline Yadan, responsable du texte au sein du groupe Renaissance, ainsi que Raphaële Jegou, administratrice de la commission des lois, qui nous a accompagnés pour l'examen de ce texte, et mes collaborateurs.

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