Mon argumentation répondra également à l'amendement non défendu de Mme Reid Arbelot, qui portait sur les gisements, question abordée également par M. Iordanoff. Les réactions que vous avez eues dans le cadre de l'audition de la semaine dernière font écho à des craintes légitimes, également soulevées devant le Sénat par Mme Lana Tetuanui.
Je tiens à vous rassurer : l'article L. 5621-2 du CG3P n'entre pas en contradiction avec les compétences de la Polynésie française. Cet article, créé par l'ordonnance dont la ratification est aujourd'hui proposée à notre assemblée, procède par renvois successifs aux articles L. 1127-1 du même code et L. 531-2 du code du patrimoine, qui prévoient que les biens culturels maritimes situés dans le domaine public maritime de l'État et dont le propriétaire est inconnu appartiennent à l'État. Ces biens culturels doivent être entendus comme des « gisements, épaves, vestiges ou généralement tout bien présentant un intérêt préhistorique, archéologique ou historique ». Ces définitions sont rigoureuses et ont plusieurs implications.
Premièrement, la codification se fait sur ce point à droit constant et ne modifie en rien le droit en vigueur applicable depuis déjà longtemps. En effet, l'article L. 531-2 du code du patrimoine est applicable en Polynésie française depuis la création de ce code, en 2004.
Deuxièmement, et je réponds notamment en cela à l'interrogation de notre collègue et à l'amendement de Mme Reid Arbelot, la notion de gisement doit être comprise au sens du code du patrimoine, c'est-à-dire comme un gisement archéologique, ce qui exclut très clairement les ressources naturelles. L'article L. 531-2 du code du patrimoine prévoit explicitement qu'un gisement archéologique doit présenter un intérêt préhistorique, archéologique ou historique. Cela ne vise donc absolument pas les gisements au sens du code minier, qui ne sont pas concernés par ce texte.
Par ailleurs, la notion de gisement archéologique est précisée par les textes. Le décret du 26 décembre 1961 qui fixe le régime des épaves maritimes précise par exemple, dans son article 26, que les épaves « importantes », telles que les navires entiers et leur cargaison, peuvent constituer des gisements archéologiques. Les travaux préparatoires de la loi relative aux biens culturels maritimes retiennent la même définition. Le rapport du sénateur Jacques Bérard de juillet 1989 fait ainsi référence aux gisements archéologiques composés de navires entiers et de leur cargaison.
Troisièmement, ces dispositions respectent parfaitement les compétences de la Polynésie française. Le statut organique de 2004 définit, dans son article 47, le domaine public maritime de la Polynésie française, sous réserve des droits de l'État, et prévoit donc que l'État puisse disposer de droits résiduels, et donc d'un domaine public maritime. Le code du patrimoine de Polynésie française, issu d'une loi de pays, consacre également l'existence du domaine public maritime de l'État. Son article LP. 111-6 prévoit notamment que la Polynésie peut revendiquer des biens culturels, « sous réserve des biens situés dans le domaine public maritime de l'État ». Ce domaine public maritime de l'État est, je le répète, très limité, constitué uniquement des trois zones que j'ai citées et qui relèvent du ministère des armées.
Enfin, l'article L. 5621-2 du CG3P apporte des précisions utiles et nécessaires. Son objet est de préciser que seuls les biens situés dans le domaine public maritime de l'État peuvent lui revenir lorsque leur propriétaire est inconnu. Cela permet justement d'exclure les biens situés dans le domaine public maritime de la Polynésie française. La suppression de cet article introduirait une incertitude sur ce point et l'on ne saurait pas de quel domaine public maritime on parle.
Je demande donc le retrait de l'amendement.
J'ajouterai, monsieur Le Gayic, une précision à propos de la zone contiguë. Lors de son audition, à laquelle vous avez participé, le président de l'Assemblée de la Polynésie française s'inquiétait de la référence au fond de la mer dans la zone contiguë, en se référant à l'article L 531-1 du code du patrimoine. Il importe de rappeler que cela ne s'applique pas en Polynésie française. L'article L. 5621-2 du CG3P ne mentionne que le domaine public maritime de l'État et ne prévoit donc pas qu'en Polynésie française, les biens publics maritimes situés au fond de la mer dans la zone contiguë appartiennent à l'État.