J'ai acheté mon premier journal à 18 ans. J'ai toujours investi dans les médias et j'y ai systématiquement gagné de l'argent, même si certains ne sont pas rentables, comme France-Antilles. C'est l'une de mes activités, je l'aime et je crois la connaître. Mon pari est simple : je pense qu'en faisant des contenus de qualité, on trouvera toujours des gens qui seront prêts à les payer.
Quand nous sommes arrivés au journal Le Monde avec Pierre Bergé et Matthieu Pigasse, nous avons fait quelque chose de contre-intuitif : nous avons renforcé la rédaction. D'un peu plus de 400 journalistes en 2010, nous sommes passés à 550 aujourd'hui. Alors que la presse était en train de disparaître, nous nous sommes dit que si nous avions de l'intelligence, nous aurions des gens qui seraient prêts à payer pour cette intelligence. Si l'on voulait vendre plus, il fallait plus d'intelligence. Et Le Monde, de toute son histoire, n'a jamais vendu autant d'exemplaires qu'aujourd'hui – de mémoire, 600 000 par jour – parce qu'il y a un contenu de qualité et des gens qui sont prêts à l'acheter.
De la même manière, quand Alain Weill, puis Pascal Houzelot, m'ont proposé d'investir à leurs côtés, j'ai été ravi de le faire. C'est très immodeste, mais nous nous sentons capables de faire des choses que les autres ne font pas, ou de penser à des choses auxquelles les autres ne pensent pas. Et nous pensons que la compétition, dans tout secteur, est une bonne chose et qu'elle permet de créer de la valeur.
Toutes les chaînes de la TNT sont rentables si l'on considère les choses à l'échelle des groupes, même NRJ 12. Selon que vous avez un magasin avenue Montaigne ou boulevard Barbès, vous ne faites pas le même chiffre d'affaires, ni les mêmes marges ; mais vous ne faites pas non plus le même investissement. On a maintenant les chiffres publics d'Altice Média : l'entreprise fait environ 120 millions d'euros de bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement (Earnings before Interest, Taxes, Depreciation, and Amortization ou Ebitda) et a été vendue 1,55 milliard. Il y a une vraie activité économique dans ce secteur et cela nous intéresse. Nous essayons donc d'inventer quelque chose de différent et de créer de la valeur.
Dès qu'on produit un contenu de qualité, on a quelque chose qui marche. Voyez TF1 : la chaîne propose des contenus de qualité qui génèrent de l'audience, des recettes et des marges. On m'a demandé pourquoi nous n'avions pas candidaté sur le canal de TF1. Étant donné que c'est notre concurrent principal dans les télécommunications, c'est donc la chaîne à laquelle nous aurions pu vouloir nous attaquer si nous étions dans un monde où l'on essaie de faire des choses désagréables à ses adversaires. Mais elle fait un travail éditorial de qualité qui fonctionne bien : jamais nous n'aurions imaginé pouvoir remplacer TF1 !
Je répète que nous sommes intéressés par ce métier, parce que nous pensons être capables de créer de la valeur.