En l'espèce, dans un tel contentieux administratif, on doit attaquer une décision spécifique si on veut l'emporter sur le régulateur. Nous avons choisi le cas de CNews, parce que c'est un acteur qui, à notre sens, je l'ai déjà dit, représente une partie des dérives ou des excès des chaînes d'information en continu. Nous n'avons pas abordé seulement, et je vous invite à ne pas faire une telle réduction, la question du pluralisme : nous avons aussi parlé de l'honnêteté et de l'indépendance de l'information, ce qui est bien différent.
Cela a été occulté par certains acteurs qui y avaient un intérêt, mais la question de l'honnêteté et de l'indépendance est aussi fondamentale dans notre démarche. Nous considérons qu'il y a pu y avoir – la requête date de 2021 – dans le groupe Canal+ et spécifiquement à CNews des épisodes à l'antenne qui posaient la question de l'honnêteté de l'information. Voyez la décision du Conseil d'État sur ce point. Nous trouvons, par ailleurs, que l'appréciation de l'indépendance que fait l'Arcom est trop limitée.
Si nous avons choisi ce cas spécifique, c'est parce qu'il s'agit d'une sorte d'idéal-type au sens wébérien du terme. Cet acteur a bénéficié, dans notre perspective – mais on n'est pas obligé d'être d'accord en la matière –, du silence et de l'absence de régulation pour mettre en place une stratégie de contournement des obligations de la loi de 1986. Je ne crois pas qu'il existe dans le paysage audiovisuel d'autres acteurs sur lesquels nous aurions pu faire porter un recours aussi spécifique sur tous ces biais.
S'agissant de la question du pluralisme, nous avons obtenu une victoire : il ne s'agit pas seulement de comptabiliser le temps de parole des hommes politiques dans de petits comptes d'apothicaire. Nous sommes satisfaits de la décision du Conseil d'État parce qu'elle nous semble aller dans le sens, évident, de la loi de 1986, qui parle de courants de pensée et d'opinion, ce qui est beaucoup plus large. Si une nouvelle méthode est mise en avant par l'Arcom, dans le délai de six mois qui lui a été donné, les règles s'appliqueront à tous et la transparence qui en résultera permettra de porter un regard sur les programmes d'autres antennes, ce qui sera très intéressant. L'audiovisuel public n'est peut-être pas parfait : des choses peuvent probablement être améliorées, car le pluralisme tel que l'Arcom le concevait jusque-là a fait son temps. Il sera intéressant d'utiliser les nouveaux outils dans le cadre d'approches critiques à l'égard des médias : nous serions ravis que l'audiovisuel public fasse l'objet de nouvelles études sur le fondement de la nouvelle appréciation du pluralisme par l'Arcom – on verra alors ce que cela donnera.